Chapitre 21
Lara ouvrit les yeux. Elle se sentait bien. Elle
flottait. Oui, c'est ça, elle flottait. Elle avait la sensation étrange de
n'être rien d'autre qu'un nuage. Soudain, une petite main fraîche et
douce se glissa dans la sienne. La petite fille aux pieds nus la regarda en souriant.
- Vous venez me chercher pour m'emmener là-haut ? demanda Lara, mais sans ouvrir la
bouche et sans entendre le son de sa voix.
La fillette ne répondit pas, mais reporta son regard vers ses pieds. Lara suivit le
mouvement, et comprit soudain qu'elle flottait vraiment. Elle se trouvait en effet
au-dessus d'une scène pour le moins originale. Elle voyait son corps allongé sur un
brancard, elle voyait sa poitrine dénudée, elle voyait plusieurs personnes autour
d'elle. En voyant un homme s'approcher d'elle et appliquer deux objets
brillants sur ses seins, elle comprit. Surprise, elle reporta son regard sur la fillette,
qui s'était éloignée. En quête d'explications, des milliers de questions au
bord des lèvres, Lara tenta de parler. Mais la petite fille se contenta de lui sourire,
puis leva la main en signe d'adieu. Lara lui rendit son salut, lentement...
- On charge à 300 ! cria un homme.
- Chargé ! répondit un autre homme.
- On s'écarte !
BOUM.
- Rien...
- On charge à 400 ! Et on s'écarte !
BOUM.
- J'ai un pouls !
- Pulsations faibles de mon côté !
- Passez-lui une ampoule d'adré. Bien... Mettez-la sous perfusion, on la
transfère en urgence !
Lara ouvrit de nouveau les yeux. Mais cette fois, elle ne
se sentait pas bien du tout ! Elle avait les poumons en feu, le ventre à l'envers,
et elle ne sentait plus ses jambes. Une peur panique la prit soudain, et elle se mit à
gigoter, tentant d'arracher les perfusions qui trouaient ses veines et les tuyaux qui
l'empêchaient de respirer correctement. Soudain, une femme jaillit de nulle part et
la plaqua violemment dans le lit, lui bloquant de force les bras.
- Calmez-vous, Lara, dit la femme. Tout va bien, vous êtes en sécurité. Ne touchez pas
à vos perfusions !
- Tu m'auras pas deux fois de suite, sale pute ! hurla Lara. Je ne me laisserais pas
droguer sans rien dire !
D'un mouvement rapide, Lara se dégagea le bras droit et attrapa immédiatement la
femme par le cou et commença à serrer. Celle-ci se défendit, tentant de lui faire
lâcher prise. Une autre femme entra alors et lâcha le plateau qu'elle portait, de
surprise.
- Faites venir la sécurité ! dit la première femme. Vite !
Quelques minutes plus tard, Lara était maîtrisée de force par deux colosses en
uniforme. Elle se débattit tant qu'elle put , terrifiée d'être de nouveau
droguée.
- Non !! hurla-t-elle. Je ne veux pas !!! Laissez-moi !
Les vigiles la lâchèrent soudain et s'écartèrent pour laisser passer Indy. Il
souleva légèrement Lara et la plaqua contre son torse.
- Calme-toi, Lara, je suis là... dit-il. Ce n'est pas une perversion de Banks. Tu
es vivante, et tu es dans un vrai hôpital. Ce sont de vrais médecins, Lara. Calme-toi.
Tu es à Londres. Je suis là ma chérie, du calme...
Blottie contre la poitrine de Jones, Lara arrêta de gigoter.
- Indy ? gémit-elle.
- Je suis là... Ca va aller...
Levant les bras, elle agrippa fermement son ami, se colla encore plus contre lui et se mit
à pleurer, secouée de profonds sanglots, et sans pouvoir s'arrêter.
- Je suis là, Lara... je suis là...
Le lendemain matin, comme Lara se réveillait d'une
nuit sans rêve, elle vit entrer la femme de la veille. Celle-ci s'approcha en
souriant et releva le haut de son lit, pour mettre la patiente pratiquement assise. Mais
Lara n'osa pas la regarder en face.
- Allons, dit la femme, ne soyez pas gênée, Lara ! J'ai l'habitude de ce genre
de réactions...
- Je... je suis vraiment désolée, finit par dire Lara.
- Je sais que vous l'êtes, ce n'est pas grave. Je suis le docteur Elisabeth
Corday. Vous êtes à l'hôpital Ste-Mary.
- A Londres ?
- Oui, à Londres.
- Où est le docteur Jones ?
- Jones ? Il n'y a pas de docteur... Ah, votre ami ! Il attend dehors, je le
laisse vous voir dans un instant !
- Merci, docteur.
Le médecin termina ses examens et se retira, laissant la place à Indy. Il entra avec un
énorme bouquet de fleurs, tellement immonde que Lara ne put s'empêcher de sourire.
- Hey, miss ! s'écria-t-il en posant un baiser sur son front. Comment vas-tu ?
- Mieux, répondit Lara. Beaucoup mieux.
- Content de l'apprendre ! Tu es plutôt solide, comme fille, tu sais...
- Je trouve aussi... On m'a tiré dessus deux fois, je suis morte deux fois,
j'ai vécu toutes sortes d'émotions intenses, etc...
- Oui, pas mal...
- Trêve de plaisanteries, raconte-moi tout ce que j'ai manqué !
- Oh, finalement, presque rien. Tous les nazis ont été arrêtés, tu as tué Banks et
mon père est mort en fermant le portail de l'Enfer.
- Je suis désolée...
- Ne le sois pas. Ce qu'il a fait me rend fier de lui. Très fier.
- Allez, donne-moi des détails.
Deux longues semaines plus tard, Lara remit des
vêtements civils avec un bonheur sans égal. Indy l'attendait devant
l'hôpital, mais elle prit le temps et le plaisir de humer l'air londonien. Puis
elle monta dans la voiture.
- En route pour le manoir Croft, nouvelle formule ! s'écria-t-elle.
- Pas tout de suite, Lara, j'aimerais te montrer quelque chose d'abord...
Sans plus d'explications, Indy roula dans les rues de Londres. Il s'arrêta dans
un quartier populaire et se gara.
- Marchons un peu, proposa-t-il.
- Que de mystères... s'étonna Lara.
Ils marchèrent de concert, Lara ayant glissé son bras sous celui de son ami. Elle avait
les jambes encore faibles, et un soutien n'était pas de refus. Ils avancèrent au
milieu des rues populeuses, pour finalement s'arrêter devant une cour où des
enfants jouaient et criaient, surveillés par leur instituteur.
- Une école... soupira Lara. Si c'est un clin d'oeil morbide, ça me
fait moyennement rire, Jones.
- Ce n'est pas une école mais un centre pour enfants défavorisés. L'homme que
tu voies là-bas n'est pas un instituteur, mais un éducateur.
- Ah. Formidable ! Bon, on rentre, je commence à...
Lara se tut soudain, comme l'éducateur en question s'approchait.
- Je peux vous aider, messieurs dame ? demanda-t-il.
- Indiana Jones, dit Indy en tendant la main. Et voici Lara Croft. Nous sommes
journalistes et nous aimerions faire un reportage sur votre établissement.
- Oh, très bien ! Notre centre est toujours friand de notoriété qui pourrait nous
apporter des fonds. Je suis Alexander West. Alex, pour les intimes.
- Vous travaillez ici depuis longtemps ?
- Quelques semaines.
- Il paraît que vous êtes amnésique... Ce n'est pas trop dur de recommencer une
vie à votre âge, sans vous souvenir de votre passé ?
- Non, ça va. Les enfants m'apportent toute l'occupation et la passion dont
j'ai besoin pour me battre, et pour me souvenir.
- Très bien. Nous vous remercions. Une équipe plus complète viendra bientôt pour vous
interviewer plus avant. Vous venez, Lara ?
Indy commença à s'éloigner, mais la jeune femme ne bougea pas, totalement figée
devant Alex West. Elle tendit la main et la posa sur la joue de l'éducateur.
- Mademoiselle ? dit-il, visiblement gêné et ne sachant que faire. Vous allez bien.
- On ne peut mieux...
Lara se mit sur la pointe des pieds et posa un doux baiser sur les lèvres d'Alex.
- Mais...
Elle le fit taire immédiatement en posant son index sur ses lèvres. Puis elle recula de
quelques pas et lui sourit.
- J'ai toujours su que tu étais un homme formidable, Alex West.
Et elle partit, sans se retourner. Elle retrouva Indy à la voiture. Il était appuyé
contre la portière conducteur, les bras croisés.
- Un jour, il retrouvera la mémoire, Lara, fit-il en ouvrant la portière.
- Je sais, Indy, je sais. Un jour, sûrement...
FIN
|