Chapitre 19
On ne pouvait entendre que le délicat
écoulement de l'eau des fontaines, le calme plat, pas un souffle de vent, le
silence complet. Lara regarda sa montre, affichant timidement 4h du matin.
Poussant discrètement la grille qui grinça quelque peu, John et elle
pénétrèrent comme de vulgaires voleurs dans le jardin Croft. Il était
toujours aussi bien soigné, malgré que les fleurs fussent fanées. Un léger
petit voile blanc couvrait encore quelque peu les graviers du jardin, signe
qu'il avait dû neiger avant le retour de la jeune femme chez elle.
« Alors, voilà à quoi ressemble la demeure d'une grande Lady Anglaise. » Rit
John en observant la demeure imposante tel un géant de pierre.
Lara plaça son index perpendiculaire à sa bouche, afin de faire signe à John
de se taire. Il haussa les épaules en souriant, la jeune femme le remercia
d'un clin d'œil complice, il ne fallait pas le réveiller, si jamais il les
entendait, l'aventurière aurait certainement la honte de sa vie.
Lara s'approcha de la porte principale,
après avoir tapé un code spécial, elle désactiva l'alarme et ils purent
entrer. Quand la Lady était absente, Winston branchait toujours l'alarme.
Les ténèbres avaient englouti la maison trempée dans le noir. Le Tic Tac de
la grande horloge résonnait dans l'immense manoir, vide de toute vie. Lara
attrapa John par la main afin de le guider dans l'obscurité, quand on
connaît sa demeure, facile de se diriger dans le noir, mais sinon...
Sur la pointe des pieds, le couple monta doucement les marches, étouffant au
maximum le son de leurs pas avec les épais tapis. Lara poussa la porte de sa
chambre, excitée de pouvoir reprendre une respiration normale. Elle sursauta
en lâchant la main du jeune homme, surprise par un cri de colère.
« Miss, c'est à cette heure de la nuit que vous daignez rentrer ?! Pour
rentrer dans un état à faire fuir une horde de sangliers de plus ?! »
Winston venait de sortir de sa propre chambre, il possédait une ouïe
inviolable. Le vieil homme se rapprocha de la jeune femme, les mains sur les
hanches. Son pyjama blanc affichait de petits nuage bleu clair alors qu'un
bonnet de nuit pendouillait le long de sa joue droite. Malgré cette tenue
enfantine, le vieil homme faisait froid dans le dos, de par la colère qui
enflammait ses yeux.
« Comment pouvez-vous avoir l'audace de me revenir de la sorte ! Vous êtes
la honte de toute l'aristocratie anglaise, Miss, allez immédiatement vous
laver ! »
John porta une main à sa bouche pour pouffer de rire, Lara lui jeta alors un
regard noir, honteuse, elle s'engouffra, dans sa chambre. Winston se
rapprocha de John ne pouvant s'arrêter de rire de la scène.
« Au lieu de vous esclaffer, vous feriez bien de faire de même, cette odeur
de jungle est odieuse et insupportable. »
« Je te présente mon majordome aux sens délicats, Winston. » Rit Lara de la
pièce
« Je suis bien fatigué de vos enfantillages, il n'est pas l'heure pour cela,
je retourne me coucher, Miss. Nous ferons plus ample connaissance, à une
heure plus décente, si vous le voulez bien ?!»
« Mais j'en serais ravi. » Sourit John en rentrant lui aussi dans la chambre
Le jeune homme referma la porte derrière
lui, la cheminée crépitait laissant quelques étincelles s'éteindre sur le
parquet tiède. Les grandes fenêtres offraient la vue sur le sombre parcours
d'entraînement endormi à cette heure. De fins rideaux bleus offraient une
décoration paisible aux fenêtres, ces mêmes rideaux entourant le lit à
baldaquin en face de la cheminée.
« Ne bouge pas, je reviens tout de suite. » Déclara, Lara, en s'apprêtant à
quitter la pièce.
Le jeune homme se dirigea vers la salle de bain, immensément grande. Il
resta ébahi dans la pièce, ce que l'on appelait piscine dans le commun des
mortels, se nommait baignoire chez Lara Croft. De couleur bleutée, le
dallage s'accordait parfaitement avec la couleur bleu plus foncé des murs.
Il entendit la porte se rouvrir et se retourna, simultanément, Lara pénétra
dans la salle de bain, une pile de vêtements masculins dans les bras.
« Tiens cela devrait être à ta taille. Tu vas pouvoir te décrasser et te
changer. »
John empoigna les habits qu'il déposa soigneusement près de la baignoire.
« Comment se fait-il que tu aies des vêtements pour homme ?! »
« Disons que je suis quelqu'un de prévoyant. »
Elle quitta la salle en fermant la porte
derrière elle. Lara se laissa tomber sur son grand lit, les bras en croix,
fixant le plafond illuminé par le feu et prenant des teintes flamboyantes,
avec le reflet des flammes. Quelques secondes plus tard, le son singulier de
l'eau qui coule dans une baignoire se déclencha. Oui c'était le moment. Elle
sauta du lit et se dirigea vers sa salle d'armes, dans laquelle elle avait
rangé son petit sac à dos. Elle en sortit le journal de bord, et se rassit
sur son lit pour y continuer la lecture. En tailleur, la tête posée dans sa
main droite elle feuilletait les pages une à une pour retrouver l'endroit où
elle avait stoppé la lecture au Canada.
« 20h ! Ils vivent de plus en plus longtemps. C'est le quatorzième, il
m'a parlé, même si ce ne sont que des sons incompréhensibles, je sais qu'il
évolue au fur et à mesure de leur croissance. Ils naissent adultes, enfin je
crée des adultes, leur peau n'est pas encore là, elle apparaît quand ils
grandissent. Celui-ci est aussi mort, mais il a bougé, a couru, il a vécu
comme un véritable être humain ! »
Voilà, elle en était bien là, Braik venait de créer sa quatorzième créature,
et maîtrisait peu à peu son pouvoir. Un frisson parcourut le dos de Lara,
ayant toujours une oreille près de la salle de bain afin d'entendre revenir
John à tout moment. Elle tourna doucement la page, afin de faire le moins de
bruit possible, comme si elle craignait que son ami ne l'entende, un certain
stress, presque palpable, étouffait l'aura de la jeune femme.
« C'est le 15e, une réussite, il a dépassé 24h et vit toujours. J'ai
enfin réussi, il est presque parfait, parle à merveille malgré sa voix
inhumaine, comprend tout ce que je lui dis, mais il n'en reste pas moins une
coquille vide, je dois continuer mes recherches. Cependant, sa fierté et son
outrecuidance me font peur, son regard est si sombre que j'ai peur qu'il
vienne me poignarder dans mon sommeil. Si les créatures ont réussi à
développer des sentiments sans l'aide de quiconque, alors les miennes en
seront aussi capables, j'en suis certain. »
Les doigts moites de Lara tremblaient, elle se sentait mal assise et finit
par se lever brutalement, faisant les cent pas sans pour autant stopper la
lecture.
« Enfin le voilà, il est parfait, j'ai enfin pu créer un véritable être
humain. En seulement cinq heures, son corps fut entièrement recouvert de
peau. Il développe beaucoup plus rapidement des réflexes, et des sentiments,
je crois qu'il m'a même appelé père, je suis très touché. Il apprend
tellement vite, il développe de véritables sentiments, et n'a besoin de
personne, il est doux et sincère, il te ressemble tant, enfin tu es à
nouveau près de moi. Mais je sens la haine monter de jour en jour. Nº 15 est
trop jaloux de la perfection de 16, j'aimerais le détruire, mais je crains
d'échouer. Sa force est bien trop puissante, 15 est capable de tout, si je
ne le tue pas, c'est lui qui me tuera, il tuera aussi mon fils. John, je lui
ai donné ton nom, mon fils, toi qui m'as quitté il y a si longtemps, je peux
enfin te serrer dans mes bras[...] »
Le livre tomba à terre, s'écrasant sur le
bois dans un bruit sourd. Lara resta figée, ne sachant quoi penser. Elle se
le répétait, non ce ne sont que des coïncidences, ça ne peut pas être cela.
Et puis même si par un vent de folie ça l'était, quelle pitoyable importance
pouvait-elle y accorder ?
Lara se retourna vers la porte close de la salle de bain, d'où elle
percevait toujours le son de l'eau, couplé à la voix de John chantant une
vielle chanson sous la douche.
« No hell below, above us only sky... »
Qu'est ce qu'il peut chanter faux ! pensa Lara en ramassant le livre. Elle
dévisagea la cheminée, ne détachant pas une seule seconde ses yeux des
flammes rougeoyantes. Elle s'approcha, s'agenouilla près du feu, la couleur
vive piquait ses yeux fatigués, tellement fatigués. D'un mouvement coléreux,
elle jeta le journal dans la cheminée, laissant de la cendre s'étaler sur le
sol. Les flammes encerclèrent l'ouvrage, le livre brûla dans le hurlement du
feu. Les pages disparurent dans les cendres en se tordant de douleur, la
couverture se recroquevilla en une chose difforme. Et alors que les mots, le
doute rejoignirent le ciel avec la fumée, Lara s'entêtait à n'avoir jamais
lu ce journal, à n'avoir jamais rien su, à n'avoir jamais rien... cru... « Je
n'ai pas de parents... » « Vous n'avez même pas frôlé la mort. La blessure
n'était pas profonde, c'était assez superficiel. » « Tu veux me tuer ?
Impossible, tu as devant toi l'immortalité en personne, je suis Dieu ! » «
Ton pantalon est coupé en deux, ton mollet doit être ouvert !!! » « Tu vois,
je vais très bien ! » « Et ce corps devant moi...je pleurais...il ressemblait
tellement à...Braik... »
Lara jeune femme serra terriblement ses points tremblant, elle jeta alors sa
tête en avant, provoquant une horrible douleur qui fit craquer ses
cervicales.
« OUI, CE NE SONT QUE DES COÏNCIDENCES, RIEN DE PLUS !!! »
« Si tu continues à faire du bruit, tu vas encore te faire gronder par
Winston. »
John déboula dans la chambre tout sourire, il séchait encore ses cheveux
humides à l'aide d'une serviette blanche. Torse nu, il n'avait enfilé qu'un
pantalon et la pierre embrassait le feu volant ainsi ses teintes orangées.
Il se rapprocha de Lara, celle-ci était toujours figée devant la cheminée.
« Mais, tu pleures ? »
La jeune femme sentit une petite larme s'écouler de sa joue jusqu'à son
menton, elle passa une main timide et délicate sur son visage chaud, sentant
la goutte humide, imprégner son index tremblant.
« Moi ? Moi je pleure ?! »
John prit le visage de Lara sans ses mains, celui-ci était si pâle, un froid
interne, glacial, combattait la chaleur extérieure, donnant une sensation
bizarre à la peau de la jeune femme. Les yeux de Lara pétillaient, brillant
telles deux billes brunes.
« Tu es fatiguée, va prendre un bain pour te détendre. »
Elle partit alors sans un mot vers la salle
de bain, dans laquelle elle s'enferma, restant appuyée à la porte de bois.
La baignoire se remplissait, une légère vapeur flottait dans l'air couvrant
les miroirs de buée, il faisait chaud, trop chaud. Lara s'approcha de la
fenêtre, qu'elle ouvrit en grand, l'air s'engouffra dans la salle de bain.
L'aventurière ferma les yeux, profitant de l'opposition des deux
températures, une sensation agréable, qui la calma un peu.
Fermant le robinet avant de commencer à se déshabiller, elle laissa tomber
son pantalon au sol. Jetant les vêtements boueux dans le panier à linge,
elle s'engouffra dans le liquide. Seuls sa tête et ses bras dépassaient de
l'eau, la nuque posée sur le rebord de la baignoire, les yeux fermés, Lara
se reposait. Sans qu'elle s'en rende compte, son corps se faisait de plus en
plus lourd, et s'enfonçait dans la baignoire mousseuse. La jeune femme
s'endormait, emportée par l'imposante fatigue qui broyait ses pensées. Ses
rêves lui rappelaient ce qu'elle ne voulait pas entendre, ce qu'elle tentait
d'effacer à jamais de son esprit.
« Tooooiiii Seize, le numéro parfait... c'est toi... » « C'est la seule chose
dont je me souvienne, Seize et John,... » « Je ne suis personne... » « C'est
vrai, que je t'ai fait tout oublier, même moi, Nº 15, ton propre frère ! » «
John je lui ai donné ton nom, mon fils... » « t'es pas normale! »« t'es pas
humain ou quoi ? » « ...pas humain... » « ...pas humain... » « ...pas humain... »
Elle se releva brusquement en hurlant, inspirant au passage une gorgée d'eau
vue que sa tête barbotait de moitié dans le liquide, la baignoire déborda et
inonda une partie du carrelage de la salle de bain dans une vague soudaine.
Lara sortit brusquement et glissa en toussant affreusement, tombant à terre
dans une chute douloureuse.
« Lara ? Tu vas bien ? Qu'est ce qu'il se passe là dedans ? » Hurla John en
frappant à la porte
La jeune femme se releva en gémissant, massant sa jambe éraflée par le
rebord de la baignoire.
« Oui, ne t'en fais pas... je vais... très bien... »
Coupable, tu es coupable Lara ! Encore un
mensonge de plus ? Tu ne fais que lui mentir, Lara, pourquoi agis-tu de la
sorte ? Se disait la jeune femme en enfilant une tenue de nuit.
Elle sortit de la salle de bain, John se tenait bras croisé face à la nuit,
regardant tout et rien sans bouger. Il se retourna vers Lara, qui se
dirigeait vers lui, la jeune femme faisait de petits pas maladroits, comme
si elle marchait pour la première fois.
« Ma pauvre, tu n'as vraiment pas l'air fraîche. Tu as besoin de sommeil.»
Lara se laissa tomber dans les bras de John qu'elle serra fort contre son
corps glacial, le torse de son ami offrait une tiédeur si agréable,
dégageant une douce odeur d'abricot.
« J'ai besoin... de ta chaleur... »
Elle tremblait de tous ses membres comme un petit enfant, John afficha un
regard inquiet plein de compassion sentant le corps de son amie de plus en
plus lourd. Il la souleva alors et la prit dans ses bras. La tête de Lara
tomba en arrière, il la transporta alors jusqu'au lit et l'allongea
doucement dans les couvertures, elle dormait déjà.
Le Soleil traversait sans difficulté le
verre des fenêtres, laissant la lumière envahir la chambre. Lara poussa un
petit gémissement en se retournant dans les couvertures, que les draps
étaient doux, qu'elle était bien dans son petit lit douillet. Elle s'étira,
cherchant au hasard le corps de John, mais elle tâtait le vide partout
autour d'elle. Ouvrant doucement les yeux, elle était bien seule dans le
lit, pourtant, celui-ci portait bien les marques du jeune homme à ses côtés.
Elle se redressa, tenant son dos de ses mains. Elle sentait des courbatures
tout le long de son corps douloureux. Sa chute dans la salle de bain d'hier
exposait de nombreux stigmates, en particulier des bleus, sans compter
l'énorme hématome au niveau des côtés, signature de sa rencontre avec Yven.
Lara repoussa les couvertures, et se hissa sur ses jambes tremblotantes sous
la petite douleur musculaire. Continuant de s'étirer, tous les os craquèrent
dans un chant de bonheur. Lara sourit en ouvrant les yeux et sautilla comme
une enfant vers les fenêtres, dont les rideaux avaient été tirés, John les
avait tirés ? Peut-être elle ne le faisait jamais, la lumière ne la gênait
pas vu qu'habituellement elle était toujours matinale.
Sans arrêter de sautiller, la jeune femme se dirigea vers la douche.
« Je n'en ai rien à faire de savoir d'où tu viens, qui sont tes parents
et tout le reste, j'ai juste envie de toi maintenant et plus tard, pas d'un
John sorti du passé ! »
« Oui comme je l'ai déjà dit, je m'en fiche de tout ça ! » Rit-elle comme
pour se redonner le moral
Lara se vêtit d'une tenue tout ce qu'il y
avait de plus décontracté de manière à se sentir le mieux possible. Un
pantalon de jogging bleu ciel ainsi qu'un débardeur noir sans même prendre
la peine d'enfiler des chaussures. Elle tourna le réveil afin d'en lire
l'heure, il était indiqué midi, elle avait bien profité de sa grasse matinée
en tout cas et se sentait vraiment bien.
Après avoir descendu les grands escaliers, Lara pénétra dans la salle à
manger en passant par le grand hall. Assis à la table de bois dans la salle
de restauration, John et Winston discutaient devant de ce qui semblait être
des albums photos répartis rentre des tasses de café et des croissants. La
jeune femme empoigna une pâtisserie qu'elle porta vite à sa bouche.
« Qu'est ce que vous faites ? » Demanda-t-elle curieuse avec un grand
sourire
« Tu es rayonnante, ça me fait plaisir. » Déclara John en lui souriant
Winston reprit l'attention du jeune homme sur l'album, Lara fronça les
sourcils, commençant à faire le tour de la grande table pour voir ce qu'ils
faisaient.
« Et, regardez cette photo-ci, regardez-moi ce désastre. Les adolescents de
nos jours ne savent plus se tenir et font n'importe quoi, alors quand ils
sont ivres, je ne vous explique même pas ! » Expliqua Winston en dévisageant
la jeune femme d'un regard coléreux.
Lara arracha l'album des mains de son domestique, elle resta stupéfaite en
regardant la photo en question, exposant une folle soirée d'ivresse lors de
ses 17 ans, s'étant terminée dans une tenue résignée en sous-vêtement.
« Quand je vous disais que Lady Croft était la honte de l'aristocratie
anglaise, à faire des strip-teases en pleine rue, en hurlant « tout le monde
à poil ! » j'en ai encore des frissons dans mes vieux os »
John porta sa main devant sa bouche comme pour s'empêcher à nouveau de rire.
Les joues de Lara changèrent désespérément de couleur de peau, elle devient
plus rouge qu'un poivron ayant oublié même l'existence de cette vieille
photo.
« Ô Winston pitié, j'avais 17 ans, j'étais ivre, et j'étais presque tombée
dans un coma éthylique cette nuit-là. Vous n'êtes pas obligé de lui montrer
cette photo ! »
« Ne t'énerve pas Lara. Tu sais bien que j'ai vu bien plus. »
La jeune femme poussa un grognement, balançant l'album vers John qui
entraîna au passage sa tasse allant se déverser sur sa chemise.
« Idiot va ! » Grogna t'elle en quittant la pièce.
Le jeune homme passa ses mains sur sa chemise trempée de café.
« Qu'elle est susceptible. » Rit-il en empoignant un morceau de papier pour
éponger le café
L'aventurière se dirigea à pas énervés vers
la porte d'entrée du manoir.
« Quel imbécile ce John, lorsqu'il s'y met. »
Elle poussa la porte, la lumière envahit ses yeux l'obligeant à les fermer
rapidement. Portant sa main en visière afin d'en stopper la clarté de la
lumière. Lara ouvrit à nouveau, doucement les yeux. Le sol était recouvert
d'une épaisse couverture blanche, les végétaux, vêtus de jolis vêtements
d'une même couleur. Il neigeait énormément, d'énormes flocons descendant du
ciel, venait embrasser le sol déjà abondamment recouvert. En une nuit tout
avait été vêtu de blanc, et elle ne s'en était même pas rendu compte en se
levant. Le mois de février venant tout juste de commencer, et la température
était très fraîche, la neige n'était donc pas une surprise. Un an, oui cela
allait faire un an qu'elle travaillait sur la légende de la création, et
qu'elle et John s'étaient serré la main. Elle se rendit alors compte, à quel
point le temps fuyait devant elle.
Le froid commençait à pénétrer ses
vêtements, elle rentra donc rapidement en grelottant. Se frottant
frénétiquement les bras afin d'en chasser les flocons, Lara se réchauffa
vite avec la douce chaleur qui régnait dans son bon vieux manoir, ses doigts
de pieds entièrement en état d'hypothermie, elle imita les mouvements d'une
course sur place afin de se réchauffer plus vite.
Elle monta alors les escaliers jusqu'à la
bibliothèque, elle se disait qu'elle devait sûrement posséder quelques
livres intéressants sur la légende de la création. Elle aperçut alors John
assis au bureau face à la cheminée, il essayait de passer un coup de
téléphone.
« Qui essayais-tu de joindre ? » Demanda Lara en se rapprochant
Il se retourna vers elle et reposa le combiné en soupirant.
« Je suis inquiet, j'essaye de joindre le téléphone de la base, mais ça ne
répond pas, ça ne sonne pas non plus. »
« Allons, je te dis que tu es une véritable mère poule. Laisse-les vivre
leur vie ! »
« Non, mais même les portables des gars ne fonctionnent pas, j'ai un message
comme quoi les numéros sont injoignables, ce n'est même pas sur boite vocale
rien ne fonctionne. »
Le jeune homme se leva, remettant sa frange en arrière comme à sa grande
habitude, un tic, bien a lui ça, il avait vraiment l'air soucieux et
stressé. Lara passa ses bras autour de son cou et lui sourit avec
romantisme.
« Allons, je suis sûre que tout va bien. »
Elle lui vola alors un rapide baiser qui redonna le sourire à John. Ils se
séparèrent et le jeune homme partit de la bibliothèque.
« Bon je vais prendre une douche, je reviens dans peu de temps... »
Elle le regarda s'en aller sans dire un mot, se retournant juste après vers
la fenêtre.
« Rappelle-toi Lara, tu t'en fiches de tout ça. Seul le présent t'importe !»
Dit-elle à voix haute
Une minute plus tard, un souffle de vent
tournicota face à la fenêtre recouverte de verglas. L'aventurière fronça les
sourcils, et elle se rapprocha, méfiante, du verre. Dans un immense fracas,
la vitre vola en éclats, répandant des morceaux de verre partout et laissant
la neige s'engouffrer dans la pièce. Lara porta vite son bras à son visage
afin de protéger ses yeux des cristaux volatiles. Elle fut alors projetée en
arrière, et tomba sur le dos, quelqu'un s'assit alors sur elle et essaya de
l'étrangler.
Yven l'avait retrouvé, et tentait de la tuer encore une fois. Sa force était
surhumaine, et Lara n'arrivait pas lui faire décrocher ses doigts.
« Inutile, tu ne peux pas lutter contre moi ! »
Lara se sentait rougir et monter en température, elle craignait de ne tomber
incessamment sous peu dans le coma. Elle avait beau donner d'innombrables
coups de poing à l'enfant, celui-ci n'offrait pas la moindre réaction, au
contraire ça ne faisait que l'exciter encore plus et serrer ses doigts de
plus belle.
Malgré cette force, contre laquelle, elle ne pouvait lutter, cette créature
ne restait qu'un gamin, et sa légèreté, un de ses points faibles. La jeune
femme mit alors toute sa force dans ses jambes, et comme si elle allait
exécuter une roulade arrière propulsa Yven au-dessus d'elle.
Elle se remit sur ses pieds en suffoquant affreusement, portant une main à
son coup écarlate, l'ado fut propulsé sur les étagères qui tombèrent à la
renverse en déversant les livres à terre, les ouvrages se répandirent sur la
moitié de la pièce dans un fracas horrible.
Yven se redressa en gémissant, recouvert de livres, ceux-ci retombèrent à
terre en même temps qu'il se relevait.
« Tu persistes à vouloir vivre alors ?! »
« C'est une question bien stupide, c'est plutôt toi qui devrais faire
attention tes arrières. »
« Tu es tenace, le Paradis est presque terminé, n'espère pas y avoir ta
place. »
« Et que va-t-il arriver à ce monde ?! »
« Il y réfléchit, hésitant entre le laisser s'entre-tuer ou bien abréger
directement ses souffrances. »
« Ô je vois, le grand méchant qui veut détruire le monde, ce n'est pas un
peu démodé comme scénario ? »
« Peut-être... mais il n'empêche que la nouvelle Terre sera immortelle en tout
point. Il n'y aura plus de douleur, plus de peur, ni de haine. Les gens
vivront éternellement dans l'amour et la joie. La nouvelle espèce humaine
sera parfaite comme dans l'ancien temps. »
« Oui j'ai déjà entendu cette histoire fort poétique, très joli conte de
fées. Je vois que 15 t'a bien embobiné toi aussi. Quand on voit les modèles
que vous êtes, moi j'ai peur pour la nouvelle espèce humaine. »
Lara reculait à petits pas discrètement vers la cheminée, tout en continuant
son dialogue de sourds avec Yven.
« Alors, tu es sûre de ne pas vouloir changer de camp ? » Ricana-t-il en
serrant les poings.
« Mais il faut que je te l'écrive ou tu ne comprends vraiment rien ? »
« Tant pis pour toi alors ! »
Yven se précipita sur la jeune femme, qui bondit vers le feu, et en
substitua une bûche. Elle mit alors le feu aux cheveux d'Yven, faisant un
bon en arrière. Il stoppa, s'esclaffant, toute sa tête, avant son corps
entier, devint flammes, pourtant il continuait de rire de façon démente.
« Ça ne serre à rien. Je ne sens pas la chaleur, la douleur est inconnue
chez moi, tu ne me tueras pas de la sorte. »
Il se dirigea alors vers la fenêtre, par laquelle il s'apprêta à sauter.
« Enfin bref, tu as bien dit que tu restais, c'est de ta faute tout ce qui
va arriver. Oui tu es coupable Lara, et tu quitteras John. Adios ! »
Il disparut. Lara resta immobile. Heureusement, la bibliothèque n'avait pas
pris feu, mais cet empoté avait mis un sacré bazar.
« Mais que s'est-il donc passé ici ? »
Winston débarqua dans la pièce, affolé.
« Miss Croft, vous n'avez rien ?!»
John arriva peu de temps après, aussi surpris que le majordome.
« Et la fenêtre ? Qu'est ce qu'il s'est passé ? » Continua le vieil homme
Lara se retourna vers la vitre brisée, elle sentit alors sa main la brûler
et balança la bûche en feu dans la cheminée. Se frottant les mains pour
calmer la brûlure et en chasser rapidement la cendre.
« Rien de spécial, juste un violent coup de vent. »
Et encore un mensonge, Lara tu pourrais te couronner reine des menteuses,
pensa la jeune femme en croisant les bras. En plus, John ne semblait pas du
tout la croire vu le regard qu'il lui lançait, un regard douteux et presque
coléreux, Lara lui fit coucou de la main en souriant comme une enfant,
peut-être que l'humour fera oublier tout ça. Winston se rapprocha du
téléphone en râlant et gesticulant.
« Bon il faut vite réparer cela avant que la bibliothèque ne soit inondée !»
Lara s'apprêta à sortir de la pièce,
arrivée à la portée de John, celui-ci lui décrocha quelques mots.
« Un coup de vent, vraiment ? »
« Oui puisque je te le dis. Que veux-tu que ce soit d'autre de toute manière
? »
Il est vrai que John n'était pas au courant de l'existence de Yven, seule
Lara l'avait vue au bâtiment de l'O-EN.
« Tu feras bien de dissimuler les marques de strangulation qui ornent ton
coup si tu veux être plus crédible.»
Lara se massa encore le coup, gênée, elle aurait bien aimé que quelque chose
vienne changer la situation.
Le téléphone résonna alors, Winston s'empressa de décrocher.
« Ici la demeure de Lady Croft ! » il fit une pose « Demandez-lui vous-même...
»
Lara fit alors marche arrière et prit le combiné.
« Lady Croft j'écoutes. »
Après une petite conversation, elle raccrocha le combiné, restant immobile
quelques secondes en souriant.
« Qui était-ce ? » Demanda John perplexe
« Des vacances ! » Rit Lara en s'étirant le dos
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