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Un rêve de mains rouges

Un rêve de mains rouges, Chapitre 8, par Hermione, le 12 octobre 2006.

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Partie 2 : A Dream of Red Hands

Chapitre 8 : Le sens de la mission

Je tirai quatre coups rapides sur les silhouettes que j'avais aperçues depuis le couloir. Deux s'effondrèrent aussitôt, mais à peine m'étais-je avancée que je compris deux choses.
D'une part, ils étaient plus que cinq. A découvert, il y avait maintenant plus d'une vingtaine d'autres membres de la Coterie, tous armés comme des militaires.
D'autre part, le sol était glissant. Allez savoir pourquoi. Peut-être était-ce un piège, ou une peau de banane traînant par là. La conséquence était que j'eus droit à une jolie glissade maladroite qui me fit perdre mon 9mm, s'échappant de mes mains. Le temps de me relever, j'avais cinq mitraillettes braquées sur moi. C'était ce qu'on appelait une situation foireuse, si vous permettez l'expression. J'entendis un soupir exaspéré.
-On est bien partis.
-Tais-toi, Trent ! ordonna l'un des hommes qui me surveillait.
De légers craquements, caractéristiques des torches qu'on allumait, résonnèrent, avant que la scène ne soit légèrement plus éclairée, baignant dans une atmosphère rougeâtre.
Je comptai une quinzaine d'hommes et cinq femmes. Il y avait six personnes à terre, dont Winston. Il était blessé au côté droit, mais si une femme le surveillait, c'était que de toute évidence, il était encore en vie.
J'entendis des bruits de pas derrière moi. Un autre homme me dépassa à ma gauche, tenant à la main une lance. Pas la Lance du Destin, heureusement. Même si elle me rappelait quelque chose.
-Du bois avec un Eclat Périapte ? s'exclama Kurtis en l'apercevant. C'est décevant, Gabriel. T'aurais pu trouver quelque chose de plus classe.
Gabriel ? Et dire que j'avais pensé à la Lance du Destin. Quelle ironie.
Le dénommé Gabriel répliqua doucement :
-Il a déjà été assez difficile de retrouver le corps de Pieter ainsi que le seul Eclat restant dans sa tombe...
-Les deux autres ? osai-je demander.
-Un seul suffisait pour vous tuer tous les trois.
Je fis un pas en avant, furieuse, avant d'être tenue en respect par mes surveillants.
-Winston n'a rien à voir là-dedans !
Gabriel haussa les épaules. Il s'avança vers Kurtis, toujours tenu en respect par des mitraillettes, lui aussi.
-Et c'est tout ce qui reste de la Coterie. Moi et une poignée de militaires formant notre armée.
Il nous regarda à tour de rôle. Ma haine bouillonnait dans mes veines.
-Qui a tué Pieter ? demanda Gabriel.
-Lara, répondit Kurtis.
-Karel, dis-je au même instant.
Ils me regardèrent tous, même Kurtis, comme si j'étais devenue folle. Je me souvins brusquement et avec embarras que je n'avais pas raconté à Kurtis ce qui s'était passé.
-Et vous l'avez tué, miss Croft ? questionna Gabriel d'une voix si douce qu'elle en devenait insupportable.
J'hochai la tête, serrant les dents. Je n'aurais jamais, mais jamais dû répondre à l'appel de Werner. Je savais déjà que j'allais sentir la lance de Gabriel me transpercer en premier. Mais à ma grande surprise, il se mit à rire.
-Comme la vengeance peut aller loin !
Il se tourna vers Kurtis et fit un signe aux hommes l'entourant. Le jeune homme se trouva libéré. Méfiant et perplexe, il attrapa la lance que lui jeta Gabriel. Il le fixa, ne sachant pas trop ce qui était en train de se passer.
-Ton amie a tué celui qui a assassiné ton père jadis. Elle t'a privée de ta justice. Rétablis-la.
Kurtis me jeta un regard indéfinissable.
-Karel était un Nephilim, lâchai-je d'une voix blanche.
Ses mains tenant la lance se resserrèrent violemment. Je commençais à entrevoir le plan de Gabriel.
-Vous m'avez...menti ? murmura-t-il.
-Par omission, soufflai-je.
Son regard s'anima brusquement et il s'avança d'un pas vers moi.
-Après tout, peut-être ne laisserai-je qu'une seule personne mourir, sourit Gabriel. Je te laisse le choix, Kurtis.
Les yeux fixés dans ceux du jeune homme, je savais parfaitement ce qu'il pouvait penser. Et je comprenais. Immobile, je le regardai. Il dit, lentement, le regard sombre :
-Je n'ai pas envie de mourir, lara.
J'hochai la tête, vidée de tout sentiment.
-Et je te pardonne, Kurtis.
C'était la première fois que je le tutoyais. Il s'avança vers moi, jusqu'à ce que nous soyons face à face. Il souleva la lance. L'Eclat Périapte brillait de sa lueur bleutée, contrastant avec la lumière rouge des torches.
-Je ne veux pas mourir, Lara, dit-il, et son regard était empli de détermination. J'espère que vous me pardonnerez. Je suis si désolé. Mais vous m'avez pris ma quête de justice, et je ne serai en paix que si vous mourrez...
Sa voix s'accélérait, ses yeux divaguaient, me rappelant quelque personnage fictif, mais la lance était toujours pointée sur moi.
-...Et vous n'aviez de toute façon rien à faire dans cette histoire, de quel droit vous en êtes-vous mêlée, tout ça pour votre prétendue raison personnelle...
Il leva les yeux et me fit le même clin d'...il que celui du Louvre, avec ce sourire en coin.
-...Et vous allez mourir.
Tout se déroula si rapidement que j'eus à peine le temps de réagir, et je dus compter sur mes réflexes. D'un geste extrêmement vif, il utilisa la lance...je fermai les yeux durant une seconde. J'entendis plusieurs bruits semblables à des décapitations. La douleur ne vint pas, et je rouvris les yeux.
J'eus le temps d'attraper au vol l'arme que me lança Kurtis de la main où il avait précédemment tenu la lance - Eclat. Je fis feu sur la plus proche silhouette, tandis qu'il saisissait mon 9mm à terre. Je ne m'arrêtai que lorsque je pointai le canon du Scorpion X sur Gabriel.
Celui-ci se tenait au-dessus de Winston, un Desert Eagle braqué sur la tempe de mon majordome. Il secoua la tête avec mépris.
-Dommage.
-Lara ! s'écria Kurtis.
Figée, je ne répondis pas tout de suite.
Les militaires encore vivants se regroupaient autour de leur chef. Kurtis braquait un regard désespéré sur moi, qui disait, je ne le savais que trop bien, tant pis pour Winston, là on a une chance d'en finir. Je redressai ma tête, mes yeux emplis de véritable haine sur Gabriel.
-Partez.
-Non ! hurla mon allié.
Il tendit la main, mais je tirai un unique coup de feu pour détourner le Chirugaï déjà ensanglanté de sa cible.
Puis je me tournai vers le dernier membre du Lux Veritatis, le menaçant.
-Je ne tirerai pas sur du métal, la prochaine fois.
Les yeux dans les yeux, je discernai au coin de mon champ de vision Gabriel et ses hommes qui reculaient. Comme dans un rêve, j'entendis mon nouvel ennemi :
-Il vous rendra folle, miss Croft.
Je ne répondis pas, ni ne tournai la tête vers l'extension de la Coterie qui s'enfuyait. Je les reverrais bien assez tôt, ces invités indésirables.
Lorsque je fus certaine qu'ils fussent partie, je relâchai mon arme. Le pistolet forgé par Kurtis tombé à terre dans un bruit métallique et dur. Ignorant la noirceur du regard du jeune homme, je me précipitai vers Winston, essayant de calmer le flot sortant de sa blessure. Voyant que je ne faisais rien d'autre, il laissa échapper un soupir résigné. Me bousculant sans douceur, il fit rapidement un garrot, avant d'examiner Winston.
-Il ne respire plus, constata-t-il. Appelez une ambulance.
-Le courant est coupé, objectai-je.
Agacé, il me lança son propre téléphone après l'avoir sorti de sa poche, et commença la respiration artificielle. Après avoir demandé du secours, je raccrochai.
Mon regard erra sur le salon. Des soldats fusillés, décapités par le Chirugaï, et un embroché par la lance - dont on avait retiré l'Eclat. Je respirai profondément.
Les murs étaient tapissés de rouge.
Je tournai un regard accablé vers Kurtis. Le désespoir m'envahissait.
-Que va-t-on dire ?
Il ne répondit pas.
-La vérité ? murmurai-je.
Je lâchai le portable et m'effondrai au sol, à genoux, le regard vide.
-Ils vont me croire responsable du carnage. Je n'ai même pas encore été innocentée du meurtre de Werner.
D'autres personnes venaient de mourir de ma main. Pourquoi cela me choquait-il plus qu'avant ? Parce que j'avais une mauvaise conscience ?
Désappointée, je regardai ma vie, détruite depuis l'Egypte par moi-même. En serrant les poings de rage, je sentis ma peau humide et poisseuse. Je les regardai.
Mes mains étaient rouges, et pas seulement de mon sang.
Abattue, je regardai Winston, Kurtis, le salon, les cadavres. La lumière des torches accentuait profondément l'horreur de la situation, rendant mon univers si familier, cauchemardesque. Je pensai à Werner, à Amanda, à tous ceux qui étaient tombés. Et à moi-même, qui avait chuté dans la noirceur rouge de mon âme. J'avais mesuré le prix du sang et de la vengeance. Je connaissais le moment où le conte de fées avait basculé au cauchemar, l'instant où quelque chose s'était brisé, me touchant de trop près.
Parce que justement, cela n'avait jamais été aussi proche de moi auparavant.

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