Chapitre 5
Le Roadster roulait à une vitesse modérée,
principalement à cause de son absence de pare-brise, qui donnait une grande prise au
vent. En rajoutant à cela les divers impacts de balles ornant la carrosserie,
l'impression que la voiture revenait d'un champ de bataille était parfaite. Les
deux occupants étaient silencieux, sur le chemin du retour, perdus dans leurs propres
pensées.
- J'ai trouvé ! s'écria soudain Jones,
faisant sursauter sa passagère.
- Vraiment ? s'étonna Lara. Et que
cherchaient-ils donc dans votre bureau ?
- Angelina Jolie !
- Pardon ?
- Angelina Jolie ! Vous ressemblez vraiment à
Angelina Jolie, l'actrice américaine ! Depuis le début, je cherchais à qui
vous me faisiez penser ! Je viens de trouver ! Vous voyez ? C'est la
fille de Jon Voigt !
Jones se tourna vers Lara et la découvrit les yeux
écarquillés de stupeur, la bouche ouverte en le regardant fixement. Il se mit à
sourire.
- Désolé... ria-t-il.
- Vous êtes... incroyable... dit Lara,
stupéfaite.
Ils arrivèrent à la villa, et Jones enfourcha aussitôt
une moto. Il agrippa un deuxième casque et le lança à Lara, qui le reposa aussitôt.
- Merci, mais je reste là, dit-elle. Partez fouiller les
ruines et faites attention à vous !
- Aurais-je réussi à vous dompter ? s'étonna
Jones, avant de démarrer en trombe devant le regard furibond de la jeune femme.
Une fois seule, Lara rentra dans la villa et récupéra
ses affaires dans sa chambre. Elle redescendit et posa son ordinateur portable sur une
grande table. Elle fit les branchements nécessaires, s'assit face à l'écran
et fit craquer ses doigts pour les assouplir.
- Bienvenue dans l'ère d'Internet,
Professeur ! sourit-elle.
Et elle commença ses recherches.
Jones revint quelques heures plus tard, et déposa un
imposant sac sur la table, à côté de Lara, maintenant vautrée dans son fauteuil, face
à son portable.
- Vous avez pensé à mon shampooing, en faisant les
courses ? soupira-t-elle en lorgnant sur le sac.
- Zut ! s'exclama Jones en se tapant le front.
J'ai complètement oublié et, plus grave, j'ai aussi oublié la bague de
fiançailles que je vous avais promis !
Lara ne put réprimer un petit sourire gêné, et tapa
sur quelques touches du clavier d'un air soudain concentré.
- Notre ami Rick Stavinson travaille dans le bâtiment à
Minneapolis, dans le Minnesota, dit-elle en affichant sa photo à l'écran. Marié,
pas d'enfant. Employé du mois à deux reprises l'année dernière.
- Un citoyen américain modèle, en somme... soupira
Jones. Ce qui me donne raison.
- A propos de ?
- Il s'agit forcément d'une secte. Ce gars a
forcément été enrôlé pour se retrouver à foutre le feu dans l'université de
Bombay !
- Ca cadre pas...
Un bruit de vitre qui se brise retentit alors,
immédiatement suivi de petits bruits de roulements. Regardant dans la même direction,
Lara et Jones virent une dizaine de grenades rouler à vive allure dans leur direction.
Ils restèrent complètement paralysés l'espace d'un instant, comme hypnotisés
par la menace mortelle qui roulait vers eux. D'un même élan, ils se ruèrent dans
la direction opposée et furent rapidement projetés par le souffle des explosions
simultanées. Abasourdis et assourdis, ils se relevèrent tant bien que mal au milieu des
gravats.
- Mon salon ! gémit Jones.
- Attention, c'est pas fini ! hurla Lara
malgré elle, étant temporairement sourde.
Plusieurs hommes, armés de mitraillettes, venaient de
faire leur entrée dans les restes du salon
- Veuillez vous rendre sans résister, Professeur
Jones ! retentit une voix derrière les hommes de main.
- Fuyez, ils ne me tueront pas, murmura Jones. Je suis
blessé de toute façon, je ne pourrais pas courir.
- Ne vous inquiétez pas, Jones, je m'occupe de
tout !
Lara se rua dans l'escalier proche, aussitôt suivie
par une salve de mitraillettes. Les impacts firent voler des morceaux de mur tout près
d'elle.
- Rattrapez-la ! hurla la voix
Lara se rua dans sa chambre et récupéra ses deux
magnums qu'elle avait jeté sur le lit. Elle se retourna juste à temps pour
descendre les deux premiers hommes de main. Couché sur le lit, face à la porte, elle
était bloquée par la tension, les revolvers visant l'entrée, prêts à tirer. Elle
entendit plusieurs pas se rapprocher.
- Allez, bouge ma fille... se violenta-t-elle. Ne
reste pas là...
Au prix d'un gros effort de volonté, elle roula sur
le côté et tomba du lit, juste à temps pour éviter une salve de mitraillette qui fit
voler la mousse du lit. Lara se mit à rouler dessous, ressortit de l'autre côté et
descendit deux nouveaux tueurs, avant de repartir sous le lit. Elle y resta immobile. Le
silence s'installa dans la chambre. Soudain, Lara se rua hors du lit et se jeta par
la fenêtre, heureusement ouverte, poursuivie de très près par les balles des tueurs.
Emportée par son élan, elle bondit en direction d'un balcon en léger contre-bas
par rapport à sa fenêtre, mais de l'autre côté de la cour. En l'air, à
l'apogée de son saut, elle s'orienta pour tourner sur elle-même et tira sur
les tueurs qui l'ajustaient une fois la tête en bas, les forçant à se replier
suffisamment longtemps pour lui permettre d'atterrir, certes violemment, mais
vivante, sur le petit balcon. Sans perdre de temps, elle sauta dans la cour et
s'accroupit aussitôt, les sens en alerte. Elle sentit alors quelque chose de
métallique appuyer sur l'arrière de son crane, au milieu de ses cheveux, ce qui la
fit tomber à genoux, suivi du craquement significatif d'un fusil à pompe que
l'on charge. Elle tenta de calmer sa respiration galopante, et jeta ses deux
revolvers au loin, et leva lentement les mains.
- Vous êtes surprenante, mademoiselle, dit l'homme
se trouvant du bon côté de l'arme. Vous êtes efficace. Les apparences sont
délicieusement trompeuses.
Il parlait calmement, sans aucun stress, et avec un fort
accent français.
- A qui ai-je l'honneur ? osa-t-elle demander.
- Auriez-vous l'obligeance de mettre vos charmantes
mains dans votre tout aussi charmant dos ? dit-il, ignorant sa question.
- Ai-je les moyens de refuser ? soupira-t-elle en
s'exécutant.
D'un geste rapide et efficace, l'inconnu lui
lia les poignets avec une solide paire de menottes. Il l'empoigna fermement par un
bras et la remit debout en la soulevant comme il aurait soulevé une plume. Lara en
profita pour jeter un rapide coup d'oeil dans sa direction. Elle découvrit un
homme réellement imposant, brun, bien mis et portant un costume ample et très bien
coupé. Son visage respirait la sérénité et l'absence totale d'émotions
négatives. Ensemble, ils retournèrent dans la pièce principale, dont la moitié était
maintenant en ruine. Une bonne quinzaine d'hommes de main tenaient position tout
autour du salon. Au centre, un homme d'une cinquantaine d'années, que Lara
identifia comme le chef, était accroupi sur un Indiana Jones inconscient et en sang. Il
se redressa et se tamponna la bouche et le nez avec un carrée de soie. Il s'approcha
de Lara d'un air mauvais. Elle recula, mais buta contre le colosse français
derrière elle. D'un air détaché, le vieil aristocrate gifla violemment la jeune
femme. La brutalité et la soudaineté du coup amena Lara au bord des larmes.
- Frapper une femme attachée est d'une élégance
rare, cher ami... tenta-t-elle d'ironiser en se recomposant une dignité.
Sans un mot, et toujours dans le plus grand calme,
l'homme la gifla sur l'autre joue, avec autant de violence. Lara sentit quelques
gouttes de sang s'écouler de son nez.
- Le principe de l'interrogatoire, c'est de
poser des questions et de frapper après ! sourit-elle.
Elle encaissa une nouvelle gifle. Elle commençait à
flancher sur ses jambes, mais surtout à ressentir des sueurs froides le long de son
échine. Ce type allait la battre à mort sans dire un mot et sans même hausser un
sourcil ! Maintenant à moitié assommée, le visage tuméfiée, Lara sentit
qu'on lui dénudait l'épaule. Elle sentit une aiguille s'enfoncer dans son
bras, et perdit aussitôt connaissance.
|