Chapitre 4
- Comment va-t-il, docteur ?
- Votre ami est très gravement brûlé, professeur Jones. J'ai bien peur que ses
chances de survie soient minces.
De rage, Jones se mit à frapper le mur avec le poing.
Lara restait en retrait, les bras croisés, regardant le professeur Aktar allongé dans
son lit, littéralement momifié par les bandages et avec une aide respiratoire.
- Faites de votre mieux, docteur, reprit Jones.
Sauvez-le !
- Nous ferons de notre mieux.
- Merci. Venez Lara, nous avons à faire !
Ils quittèrent l'hôpital et montèrent dans la
voiture. Il était encore tôt dans la journée, le lendemain du sinistre. L'incendie
avait été maîtrisé quelques heures auparavant.
- Vous avez prévu quelque chose ? demanda Lara.
- Evidemment ! dit-il d'un air mauvais. Excusez mon ton, se rattrapa-t-il
immédiatement.
- Vous êtes tout excusé.
- Commençons par rentrer. J'enfilerais des habits plus... pratiques et
j'irais dans les ruines de l'aile C.
- Vous comptez y trouver quoi, exactement ?
- Des confirmations de mes soupçons...
Et il démarra en trombe.
Cela faisait maintenant plusieurs heures que le feu avait
été maîtrisé, et seuls quelques pompiers affectés à la surveillance ainsi que
quelques policiers restaient en poste autour du bâtiment dévasté par les flammes.
Passer ce cordon de sécurité minimal fut une chose relativement aisée pour Jones et
Lara. Ils commencèrent à avancer parmi les ruines, enjambant des gravats, se baissant
pour éviter une poutre calcinée. Certaines parties étaient même encore fumantes. Ils
progressaient difficilement au milieu des ruines, dans la direction des restes du bureau
du professeur.
- Ca y est, dit Jones. On appro...
Soudain, Indy se jeta sur Lara, la prenant dans ses bras
et la renversant pour la faire atterrir derrière un pan de mur, au moment où un
claquement sec se produisit, immédiatement suivi par une rafale sonore de mitraillette.
L'impact des balles faisait gicler des bouts de béton, qui tombèrent sur le couple
allongé par terre. Les rafales cessèrent, rapidement remplacées par des bruits de
fuite.
- Rien de cassé, Lara ? demanda Jones
Sans attendre sa réponse, il se releva et sortit son
arme, un magnum à 6 coups réellement démodé. Il tendit la main pour aider Lara à se
relever.
- Restez ici, dit-il sans la regarder, mais en la
relevant. Ca pourrait être dangereux !
Il partit en courant au milieu des ruines, poursuivant
leur agresseur. Lara le regarda s'éloigner, se tapa un peu partout pour faire tomber
la poussière de ses vêtements et soupira profondément. Elle se mit à imiter une fille
apeurée, parlant toute seule dans les gravats, et prenant une ridicule petite voix.
- Mon dieu, du danger ! Moi, pauvre femme, je vais
vous attendre chez vous, en vous préparant le thé et en tricotant un joli pull !
Elle fronça les sourcils et dégaina ses deux
impressionnants revolvers automatiques.
Elle rejoignit Jones à l'extérieur de
l'université, au moment où il s'engouffra dans sa voiture. Elle rangea ses
armes et monta à ses côtés dans le roadster.
- Vous n'écoutez jamais ce que vous dit un homme,
Miss Croft ? demanda-t-il en fronçant les sourcils.
- Arrêtez de me prouver que vous êtes l'Indiana Jones de 1930 avec vos idées
rétrogrades, et démarrez ! répondit-elle.
Jones ouvrit la bouche pour répondre, se ravisa avec un
sourire et démarra.
Se lancer dans une folle poursuite dans les rues de
Bombay aurait été pure folie, vu le nombre de piétons et de cyclistes parcourant les
rues bondées de la ville indienne. Jones se contenta donc de suivre à distance la
camionnette blanche, dans lequel le pillard mystérieux s'était engouffré au sortir
de l'université.
- Ce n'était pas un hindou, mais bien un
occidental ! précisa Jones en conduisant tranquillement.
- Et si vous m'expliquiez vos recherches actuelles ? répondit Lara.
- Vous n'allez peut-être pas me croire, mais je ne travaille sur rien de particulier
en ce moment. Je donne surtout des cours d'archéologie, donc rien de...
dangereux.
- Très bien, alors vous avez peut-être vexé une demoiselle de bonne famille, qui vous
envoie sa famille se venger ?
- Voyons, Lara, vous savez bien que vous êtes mon seul amour !
- Il faut absolument que vous sortiez un livre avec vos meilleures vannes de drague !
Jones se mit à rire à gorge déployée, et Lara ne put
retenir un sourire. Puis ils se turent, chacun se perdant dans ses propres pensées.
- Il cherchait quelque chose, c'est évident...
reprit Jones.
- Qu'il n'a pas trouvé... renchérit Lara
- Puisque nous l'avons interrompu...
- Donc nous devons retourner là-bas pour trouver ce fameux quelque chose !
- J'aimerais d'abord avoir quelques détails de la part de notre ami !
Ils sortirent alors de Bombay et la camionnette
accéléra largement. Jones fit aussitôt bondir le roadster pour se retrouver facilement
au contact. Soudain, les deux portes arrières de l'estafette s'ouvrirent à la
volée, laissant apparaître deux hommes portant de puissantes armes et avec
l'attitude de ceux qui vont s'en servir. Les balles commencèrent à crépiter.
Le pare-brise eut le temps de se feuilleter totalement sous l'impact des balles avant
que Jones eut le réflexe de faire une violente embardée. En marmonnant quelques jurons
bien sentis, Jones pilota en faisant de grands zigzags pour compliquer la tâche de leurs
agresseurs. Tenant le volant de la main droite, Jones tira son pistolet de l'autre et
tira par la fenêtre.
- Couchez-vous ! cria-t-il à Lara.
- Ca fait deux fois que vous me faites le coup de l'homme protecteur ! protesta
Lara. Tenez bien le volant, je me charge du reste !
Sans attendre la réponse de Jones, Lara se laissa
glisser le long du siège, releva les jambes et lança violemment les pieds contre le
pare-brise morcelé. Celui-ci s'envola en un seul morceau.
- Ma voiture... gémit Jones.
Lara se redressa, les cheveux virevoltant maintenant au
vent, et entreprit de sortir de la voiture par l'avant, profitant de l'ouverture
béante laissée par le pare-brise.
- Que faites-vous ? hurla Jones. Vous êtes
folle ?
Malgré la vitesse et les chambardements, Lara réussit
à s'allonger sur le ventre, sur le capot du roadster, vers l'avant, se tenant
du bout des pieds au tableau de bord de la voiture.
- Elle est folle, elle est folle...
Une fois calée, Lara dégaina ses revolvers et tira. Les
deux agresseurs s'écroulèrent, gravement touchés. Lara roula alors sur le capot
pour se retrouver sur le dos et, penchée en arrière, tira dans les deux pneus arrières
de la camionnette, qui fit aussitôt une violente embardée. Le conducteur perdit
rapidement le contrôle, quitta la route et s'écrasa violemment contre un arbre.
Jones stoppa le roadster sur le bord de la route et descendit. Il rejoignit Lara, qui
venait de glisser le long du capot et de ranger ses armes.
- Miss Croft, vous êtes complètement folle !
cria-t-il, visiblement en colère. Vous êtes inconsciente ou quoi ?
- Vous apprendrez que je suis tout sauf une gentille femme au foyer, Jones !
répondit-elle sur le même ton.
Ils restèrent un moment fixés, debout face à face,
sans se quitter des yeux. Ce fut Indy qui céda le premier, en soupirant. Il
s'approcha de la camionnette défoncée, la contourna et commença à investiguer la
cabine du conducteur. Lara le suivit mais s'arrêta auprès des deux hommes
qu'elle avait descendu, et qui gisaient dans l'herbe, éjectés du véhicule
sous la violence du choc.
- Morts... dit Jones en revenant vers elle.
- J'en ai un de vivant... dit Lara, penchée sur l'un des hommes.
Jones s'accroupit près de lui et le releva pour
l'aider à respirer. Il était salement touché, plusieurs balles l'ayant
atteint au ventre.
- Qui êtes-vous ? demanda Lara. Et que
cherchiez-vous ?
- Et vous... vous... êtes qui ? articula-t-il péniblement.
- Croft. Lara Croft. Alors ?
- Trop tard... dit Jones. Il est mort.
Il le relâcha, et commença à regarder ses poignets,
son torse, son cou, etc.
- Vous faites quoi, exactement ? s'inquiéta
Lara.
- Je cherche un tatouage. Ce genre de bonhommes appartient forcément à une secte, ou à
une organisation secrète, ou à un groupuscule de tarés qui cherchent la domination du
monde... Rien ! finit-il, déçu.
Lara plongea la main dans la veste du mort et en
ressortit son porte-feuille.
- Et si on commençait par le commencement ?
proposa-t-elle.
- Un méchant qui se ballade avec ses papiers ?
- Bienvenu au 21e siècle, professeur ! (elle ouvrit le porte-feuille et
en sortit une carte) Rick Stavinson, ressortissant américain.
- Bien. Ne restons pas là. La police va arriver, et nous avons encore beaucoup de choses
à faire !
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