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L'école

L'école, Chapitre 11, par Pitoch, le 31 juillet 2003.

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Chapitre 11

Le hall d'entrée était aussi immense que lugubre. La lumière était tamisée, pour replonger les visiteurs dans l'ambiance de l'époque. Soudain, un homme vêtu d'une grande cape noire, les cheveux gominés en arrière et le teint très pâle, surgit soudain devant le groupe de touristes. Beaucoup d'entre eux crièrent de peur devant le vampire.
- Je suis le comte Dracula, fit-il entre ses dents. Je serais votre guide. Suivez-moi !
Il fit volte-face, faisant voler sa cape. Indiana avait presque envie de rire devant cette interprétation théâtrale. Il suivit le groupe dans différents couloirs et salles, écoutant le guide vampire d'une oreille distraite. C'est en montant de grands escaliers qu'Indy repéra une petite porte dissimulée sous une lourde tenture. L'absence totale de poussière lui prouva que le passage était fréquenté régulièrement. Bien sûr, il pouvait s'agir de l'accès au bureau de gestion du château, voire simplement les vestiaires des guides. Mais il préféra se laisser glisser en arrière du groupe de touristes, et lors d'un arrêt devant une tapisserie magnifique, il s'éclipsa. Discrètement, il se faufila sous la tenture et d'un petit coup sec de l'épaule, l'ouvrit. Il entra et referma aussitôt derrière lui. Muni d'une petite maglite qu'il venait de sortir, il commença à descendre des escaliers étroits, dans un couloir qui tenait plus du conduit. Au bout d'un bon moment, les murs lisses cédèrent la place à une taille à même la roche. Il s'enfonçait toujours plus profondément dans la montagne. Après une descente qui lui avait parue interminable, Indy arriva enfin à destination. Il déboucha sur une immense galerie artificielle qui faisait le tour d'une caverne circulaire. En bas, une véritable usine fonctionnait : ordinateurs, radars, écrans géants côtoyaient des dizaines d'opérateurs, qui travaillaient dans un joyeux brouhaha.
- Ben voyons, murmura Indy.
En se penchant un petit peu, il vit les murs de la caverne. Il ne put alors retenir un petit sourire. De grands drapeaux pendaient majestueusement. Rouge, noir et blanc. Tous frappés de la croix gammée.
- Je peux vous aider, professeur Jones ?
Indy se retourna aussitôt, prêt à dégainer l'arme qu'il n'avait de toute façon pas. Mais les réflexes ont la vie dure. Il se retrouva face à un homme en fauteuil roulant, accompagnée d'une splendide jeune asiatique.
- Monsieur Banks, je suppose ? demanda Indy.
- Votre reconnaissance me flatte, cher professeur Jones, répondit l'homme. Je vous ai néanmoins posé une question : en quoi puis-je vous aider ? Et par extension, que faites-vous ici ?
- Eh bien, je venais visiter le château de Dracula, et j'ai perdu mon groupe. Le truc bête, quoi. On se perd facilement, dans ces dédales de couloirs.
Banks garda le silence un moment, joignant ses mains devant lui.
- Professeur Jones, je vous présente Ling Li. Mon bras droit et mon garde-malade.
- Vraiment charmante, dit Indy en s'inclinant légèrement vers la jeune femme. Elle a à peine 20 ans, non ?
- 21 ans, répondit Banks.
- Elle est très belle. Mais également peu compatible avec ça.
Sans regarder, il désigna du pouce les drapeaux pendus en contre-bas.
- Le néo-nazisme a dû évoluer pour survivre, expliqua Banks. Bien sûr, nous sommes plus que jamais pour la pureté de la race aryenne, mais d'autres races, mineures, sont également nécessaires pour... les basses oeuvres.
- J'adore, soupira Indy. En un demi-siècle, le discours est toujours aussi crétin.
- Crétin parce que vous ne le comprenez pas !
Ling li sortit alors un revolver et le tendit aussitôt à son patron. Banks mit alors Indy en joue.
- Voyez-vous, professeur Jones, les gentils gagnent toujours, dans les films. Et vous savez pourquoi ?
- Parce qu'ils sont gentils ? proposa Indy en levant les mains.
- Non. Parce que les méchants les laissent trop longtemps en vie. Je suis partisan de cette théorie. On capture un gentil, on le tue tout de suite !
Banks pressa la détente, et le coup de feu résonna dans toute la caverne. Indy grimaça en se tenant la poitrine, et tomba à genoux.
- C'est trop simple, soupira Banks. J'ai eu Croft, j'ai eu Jones père, et maintenant, je tue Jones fils avec une facilité ! C'est déprimant ! A quand un vrai challenge ?
Indy n'entendit pas la fin de la phrase. Il s'écroula, touché à mort.

Comme tous les jours depuis des semaines, Lara quitta son lit pour rejoindre, difficilement, son fauteuil roulant. Une fois installée, elle se laissa rouler jusqu'à la fenêtre, pour occuper sa journée. En regardant dehors, le regard vide, les pensées vagabondant sur son passé, sur ses exploits, bref, sur sa vie qu'elle avait perdu. Elle se sentait constamment lasse, mais l'infirmière lui avait expliqué que c'était normal, que c'était dû au traitement qu'elle continuait à subir. Elle n'avait plus de perfusions, mais prenait toujours plusieurs cachets par jour. Le médecin lui interdisait toujours de sortir de sa chambre, car ses défenses immunitaires étaient trop faibles. Bref, cela faisait des semaines que Lara était en quarantaine, prisonnière d'une clinique australienne, sans pouvoir avertir personne. Son manoir ne répondait pas. Certainement détruit. Winston et Bryce étaient partis, la croyant morte. Sa vie était ruinée. Elle pensait de plus en plus au suicide. Elle, Lara Croft. L'intrépide. La fougueuse. La dynamique. La Tomb Raider.
L'infirmière entra plusieurs fois dans la chambre, et à chaque fois, Lara était immobile, dans la même position. Elle regardait les dernières feuilles tomber des arbres. L'hiver s'annonçait vraiment rude. Soudain, la jeune femme fronça les sourcils. Elle regardait par cette fenêtre depuis des semaines, et c'est seulement maintenant qu'elle le remarquait. Elle fit pivoter son fauteuil et se rua dans la minuscule salle de bains. Elle boucha le lavabo et ouvrit l'eau à fond. Une fois la cuvette pleine, elle ré-appuya sur le poussoir, et regarda l'eau s'évacuer en un joli tourbillon. Elle resta un moment là, à regarder le lavabo vide. Puis elle retourna dans sa chambre, puis dans son lit, à l'instant même où l'infirmière rentrait.
- Ah, Lara, vous avez terminé votre petite observation ?
- Oui, ça me suffit pour le moment, répondit la jeune femme.
- Tenez, vos pilules !
Lara prit les deux pilules, les mit dans sa bouche et les avala avec un grand verre d'eau. L'infirmière lui sourit et sortit de la chambre. Elle ne vit donc pas que Lara était métamorphosée. Ses yeux étaient redevenus durs. Elle porta la main à sa bouche et cracha les deux pilules.
- Nom de Dieu... murmura-t-elle. Canberra, mon oeil ! Les feuilles qui tombent, l'eau qui s'écoule dans le sens des aiguilles d'une montre ! Je suis dans l'hémisphère nord !
Le lendemain matin, Lara avait une jolie collection d'une vingtaine de pilules non avalées. Elle avait alors pu constater que l'infirmière vérifiait toujours qu'elle prenait bien ses médicaments. Au fur et à mesure, certaines évidences frappèrent la jeune femme. Ses idées s'éclaircissaient. Elle n'était jamais sorti de sa chambre. Elle n'avait reçu aucune visite, même pas de la police, ce qui aurait du être une procédure normale pour une victime d'armes à feu. Elle n'avait vu, en tout et pour tout, que deux personnes, son infirmière et le chirurgien. Et enfin, l'infirmière fermait la porte de la chambre à clé ! Son esprit embrouillé et mélancolique avait enregistré tout ça, mais sans l'analyser. Maintenant, tout semblait si évident ! Soudain, elle eut une révélation. Les pilules ne servaient pas seulement à la droguer. Elle retira précipitamment le drap, prit une petite aiguille qui traînait non loin de là et se la planta dans le pied. Une goutte de sang perla mais surtout, elle avait ressenti une vive douleur ! Prise d'une violente excitation, Lara s'assit sur le bord du lit, et posa les pieds par terre. Doucement, en se tenant au lit, elle se mit debout. Ses jambes flageolaient, elle se sentait très instable, mais elle tenait. Elle lâcha prise. Maladroitement, elle commença à traverser la chambre en marchant. Elle fit ainsi plusieurs aller-retours, marchant de plus en plus vite. Elle s'accroupit plusieurs fois, sauta, changea de direction, bref, se re-muscla rapidement les jambes. Puis elle revint sur le lit, se rallongea et se mit à sangloter. Mais les larmes s'arrêtèrent aussitôt. La mâchoire serrée, le regard dur, Lara empoigna le bouton d'appel.
- Vous allez me le payer, murmura-t-elle froidement.

Indy se réveilla avec une gueule de bois monstrueuse. Il avait la poitrine douloureuse, comme si un train lui avait roulé dessus. Il était dans une sorte de cellule humide, couverte de paille moisie. Il reconnut aussitôt son père, assis dans un coin.
- Père ? gémit-il en se redressant. Ca va ?
- Bien, Junior, merci. Ils m'ont apporté ton cadavre pour me finir au moral et me faire parler. Apparemment, ils ignorent ta petite particularité.
- C'est une chance ! Ca va rapidement être utile.
- Tu vas encore me sortir de là, Junior ? Comme en 36 ?
- Je vais essayer, oui. Et c'est Indiana.
Indy se leva en titubant, se rattrapant de justesse contre les murs. Sa chemise était en sang, mais l'impact de la balle avait disparu sur sa poitrine. Il repéra aussitôt la porte en métal et se recoucha par terre, dans la même position.
- Quand on viendra vous chercher, débrouillez-vous pour l'attirer le plus possible par ici, expliqua Indy. Puis toussez pour me prévenir, et je m'en occuperais. Compris ?
- J'ai compris, Junior, je ne suis pas idiot !
Indy se mit donc face contre terre, tournant le dos à la porte. Il n'eut pas longtemps à attendre. Il entendit bientôt la porte s'ouvrir en grinçant. La paille crissant sous des pas. Il avait tous les muscles tendus, prêt à bondir au signal de son père. Mais la porte se referma bruyamment sans que Henry Jones n'ait toussé. Indy attendit une minute, puis se releva.
- Pas assez proche ? demanda-t-il.
- Oh si, mais il m'apportait à manger ! répondit le vieil archéologue en désignant un plateau par terre.
- Et alors ?
- Tu m'as dit que c'était seulement s'il venait me chercher, Junior.
- Père !!!! gémit Indy.
- Tu n'avais qu'à être moins précis !
- Mais enfin, vous le faites exprès, ou quoi ? Je voulais neutraliser votre garde, peu importe ce qu'il venait faire !
- Oh, ça va, ne hurle pas, tu vas nous attirer des ennuis, Junior !
- Des ennuis ? Vous ne trouvez pas qu'on est déjà mal parti, là ?
Soudain, la porte s'ouvrit sur le garde, qui entra aussitôt pour se retrouver face à face avec Indy. Les deux hommes en restèrent surpris tous les deux, mais l'aventurier réagit en premier. D'un violent coup de poing au visage, il étala l'entrant.
- On en reparlera, Père, fit-il d'un index menaçant. Et pour la dernière fois... (il donna un violent coup de pied au garde gémissant par terre) c'est Indiana !
S'assurant que le garde avait son compte, Indy entreprit de le fouiller. Il trouva tout ce qu'il pouvait désirer : une arme et un jeu de clefs complet. Il passa doucement la tête par l'encadrement de la porte et regarda à l'extérieur. D'un petit geste rapide de la main, il ordonna à son père de le suivre, et ils sortirent. Ils se trouvaient visiblement dans les catacombes du château. Il ne faisait aucun doute que tout avait aménagé par Banks lui-même, qui avait construit une véritable base d'opération nazie sous le château de Dracula. Les deux hommes progressèrent lentement, sursautant au moindre bruit suspect. Montant divers escaliers taillés dans la roche, ils finirent par retrouver la galerie principale, surplombant le quartier général. Indy, rassuré de reconnaître son chemin, emprunta de nouveau le petit couloir d'accès, et ils remontèrent dans le château en lui-même. Le car l'attendait. La jeune guide commençait à s'inquiéter, et les touristes s'impatientaient en maudissant celui qui leur faisait perdre leur temps.
- Ah, vous voilà enfin ! s'écria-t-elle. Nous vous attendons depuis deux heures !
- Je m'étais perdu, fit Indy en souriant. C'est terrifiant, ce château ! On y trouve de ces horreurs...
- Bien sûr, bien sûr. Allez, montez ! Nous sommes très en retard !
Le car démarra, et Indy se retourna pour voir s'éloigner le château mythique.
- Les nazis, encore et toujours, soupira Henry.
- Eh oui, père. Ca manquait presque !
- En tout cas, Junior, il est difficile de croire que toute cette logistique ne serve que la recherche de Scholomance.
- C'est évident. Ils préparent un coup plus... pragmatique. Une attaque terroriste, sûrement.
- Mais Banks semble quand même passionné par l'Ecole.
- Parce qu'il croit au surnaturel. Il sait la puissance qu'il obtiendrait de la part du Malin.
- Sauf qu'il ne peut pas convaincre son groupuscule de la réalité de la légende.
- Il n'a pas le charisme ni la poigne d'Adolf Hitler.
- Et la légende de Scholomance est quand même moins connue que celle du Graal !
- Il faudrait prévenir les autorités. Nous avons assez de preuves, au moins pour l'organisation néo-nazie.
- Ce serait une erreur, fit le vieil homme. Nous devons rester silencieux si nous voulons empêcher l'Ecole d'avoir lieu. Si le monde l'apprend, Banks se volatilisera dans la nature, et se fera oublier. Nous tenons un fil très fin qui nous relie à lui. Si nous le cassons, nous courrons à la catastrophe.
- Donc ?
- On surveille, on suit, et on récupère le jeune West avant qu'il ne fasse une bêtise.
- Comment pouvez-vous savoir que... Mon Dieu, je ne vous ai même pas demandé ce que vous savez sur Lara !
Le vieil homme se tourna vers son fils, surpris par le ton.
- Ils l'ont mis sous perfusion dès notre entrée dans l'hélicoptère. Quand nous sommes arrivés en Roumanie, nous avons été séparés.
- Mais elle était vivante ?
- Oui, elle l'était.

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