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L'école

L'école, Chapitre 12, par Pitoch, le 16 septembre 2003.

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Chapitre 12

Lara semblait extrêmement lasse quand l'infirmière entra, suite à l'appel urgent de la jeune femme. Elle soupira.
- Que se passe-t-il, Lara ? demanda-t-elle. Une nouvelle déprime ?
- Non, je suis très fatiguée d'un coup, je ne sais pas pourquoi, gémit la jeune femme.
Lentement, elle ouvrit le tiroir de sa table de chevet, tandis que l'infirmière commençait à regarder la feuille au pied du lit.
- Je ne vois rien d'anormal, finit-elle par dire. Je vais prendre votre tension.
- Attendez, prenez ça, aussi, gémit Lara.
Elle tendit le pot qu'elle venait de sortir à l'infirmière. Mais elle le lâcha avant qu'elle ne l'attrape, et le contenu se répandit par terre dans une multitude de cliquetis. L'infirmière regarda toutes les pilules d'un air interdit. Lentement, elle comprit toutes les implications de la présence de ces cachets roulant sur le sol. Elle releva la tête et regarda Lara, maintenant debout en face d'elle.
- Vous allez me tuer ? demanda l'infirmière.
- Y'a de fortes chances, oui, répondit Lara sur un ton glacial. Sauf si vous me prouvez que vous n'êtes que le dernier intermédiaire. Auquel cas je vous demanderais de tout m'expliquer dans les détails.
Lara plongea la main dans une des poches de la blouse blanche et en sortit les clés de la chambre. Elle ferma puis, se retournant, gifla violemment l'infirmière. La claque fit un bruit sec, et les yeux de la femme se mouillèrent de larmes, tandis que la joue rougissait. Lara attendit quelques secondes, puis la gifla de nouveau, du même côté, avec encore plus de force.
- Asseyez-vous ! ordonna-t-elle, toujours sur un ton glacial.
L'infirmière, soumise et terrorisée, s'assit sur la chaise posée contre le mur. Elle leva les yeux. Le regard de Lara ne laissait aucun doute : la jeune femme était dans une colère, voire une rage proche de la démence. L'infirmière ne fut donc pas vraiment surprise de reprendre une violente gifle.
- Je vous écoute, dit Lara. D'abord, sommes-nous dans une vraie clinique ?
- Non. C'est une vieille masure abandonnée, dont seule cette pièce a été aménagée en chambre d'hôpital.
- Où sommes-nous ?
- Mes chefs vont s'inquiéter si je ne présente pas mon rapport horaire...
Lara fit un petit sourire et se pencha vers l'infirmière, à quelques centimètres de son visage.
- Bonne idée, Miss. Résistez-moi !
La jeune femme se redressa. Colère, désespoir, peur, frustration, toutes les émotions que Lara avait ressenti pendant ce dernier mois se retrouvaient dans son poing serré. Le coup qu'elle porta à l'infirmière sans défense était d'une telle violence que sa victime s'écroula aussitôt, le nez et les lèvres explosés. Lara mit un moment à retrouver ses esprits, à se calmer et à faire retomber l'adrénaline. Lentement, elle ouvrit la porte de la chambre. Elle jeta de petits coups d'oeil rapide à l'extérieur, puis sortit. Elle constata aussitôt que l'infirmière n'avait pas menti : elle était dans un couloir délabré, abandonné depuis des années, où seules des traces de pas dans la poussière prouvaient une activité récente. Pieds nus, en robe d'hôpital, Lara avança en silence en longeant les murs. Elle ouvrit la première porte qu'elle trouva dans le couloir, et retint aussitôt un cri de joie : toutes ses affaires étaient là, en tas, vêtements comme... le reste. Elle s'habilla rapidement et caressa ses armes du bout des doigts. Elle se sentait rassurée par leur présence. Elle les empoigna fermement et resta un moment immobile. Elle entretenait sa rage en repensant aux terribles jours qu'elle venait de passer. Elle arma les deux revolvers.
- Maintenant, ça va chier ! dit-elle entre ses dents.
Elle sortit de la chambre, emprunta le couloir délabré et descendit des escaliers branlants. Regardant par une fenêtre, elle repéra deux jeeps et une dizaine d'hommes en tenue para-militaire. Tranquillement, elle sortit de la masure. L'homme le plus proche s'approcha d'elle.
- Il ne faut pas sortir, mademoi...
Il n'eut pas le temps de finir. Il s'écroula lourdement, la bouche ouverte, les yeux exorbités, un trou au milieu du front. Le coup de feu alerta les autres miliciens. Froidement, comme dans un état second, Lara les abattit un par un, sans hésitation, sans remord. Quand elle reprit le contrôle de ses nerfs, elle était au milieu d'une dizaine de cadavres. Elle rangea ses armes et monta dans une des jeeps. Sans un regard en arrière, elle partit en trombe.

Le terminal principal de l'aéroport de Bucarest était en pleine effervescence. L'heure était propice aux départs et arrivées des avions européens et asiatiques. Le professeur Henry Jones était en complet décalage avec les voyageurs transitant autour de lui. Habillé de son éternelle redingote et de son chapeau mou, il attendait patiemment, assis sur un banc, sa sacoche sur les genoux. Il finit par se lever et agita les bras pour signaler sa présence. Une vraie réussite, puisque la moitié de l'aéroport se retourna pour le regarder. Heureusement, parmi tous ces anonymes, le destinataire des gestes regardait aussi. Il s'approcha donc.
- Content de vous revoir, West, dit Jones Senior en tendant la main.
- Moi aussi, Professeur, répondit Alex. Vous êtes libre et entier, ça fait plaisir.
- Oui, grâce à mon fils, de nouveau. Je tiens immédiatement à vous rassurer, jeune homme, concernant votre amie Lara.
- Me rassurer ? Elle est vivante ?
- Eh bien... Ce serait s'avancer un peu vite...
Alex retrouva sa mine renfrognée.
- Elle l'était quand nous sommes partis ensemble du manoir, s'empressa d'ajouter le vieil homme.
- Le coup de téléphone d'Indy m'a étonné, dit Alex, changeant de sujet. Pourquoi vous a-t-il envoyé me réceptionner ?
- Nous voulons absolument vous empêcher de faire une bêtise. Disons que tuer Banks serait une véritable catastrophe mondiale. Il est impératif que nous permettions à Banks de...
- Ne parlons pas de cela ici, en plein aéroport, le coupa Alex. Allons dans un coin tranquille.
Il prit le vieux Jones par le bras et l'attira à l'extérieur du terminal. Il le fit entrer dans une petite pièce servant de débarras au service de nettoyage et referma aussitôt.
- Mais que faites-vous ? cria Henry derrière la porte.
- Je suis désolé, professeur, fit Alex. Sincèrement. Mais je ne peux pas vous permettre de contrecarrer mes plans.
- Ne faites pas ça, je vous en prie ! West ? Vous êtes encore là ? West ?
Alex était déjà en train de monter dans un taxi.

Depuis déjà deux semaines, Indy faisait de la surveillance discrète. Où Banks allait, il allait. Chacun des faits et gestes du milliardaire était épié et analysé. Tout nécessaire qu'elle était, cette mission était extrêmement rebutante, et Jones commençait à craquer nerveusement. Il en avait marre, et ses envies de tout abandonner se faisaient de plus en plus pressantes. Heureusement pour lui, les choses s'accéléraient. Depuis deux jours, le château de Dracula était fermé au public, pour rénovations selon les raisons officielles évoquées. Indy en avait conclu que la session de l'Ecole Maudite était proche.
Caché en hauteur, avec des jumelles, il observait l'arrivée de plusieurs gros camions, floqués de sigles d'entreprises de travaux publics. Ils entraient l'un après l'autre dans la cour du château, et se garaient. Les bâches étaient aussitôt retirées, et du matériel qu'Indy ne reconnut pas était déchargé et entreposé dans un coin. Il repéra Banks sur son fauteuil, accompagné de la jeune asiatique, qui regardait le déroulement des opérations avec attention. Tout semblait régler militairement, ce qui, en soi, n'était pas très étonnant de la part de nazis. Indy posa ses jumelles et soupira. Il ne savait plus vraiment quoi faire. Il connaissait l'objectif de Banks et le lieu de l'opération. Maintenant, il fallait définir le moment et la façon pour agir et empêcher les nazis de s'allier au Malin. Indy soupira de nouveau, en proie à un pessimisme qui l'entraînait vers le renoncement. Il redescendit de son point de vue et rejoignit sa moto. Il mit son casque et démarra. Il avait besoin de discuter avec son père, et donc avec Alex, puisqu'ils devaient être ensemble à l'heure actuelle. Il roula sur des routes sinueuses et finit par se perdre au milieu de ces immenses forêts sombres. Il s'arrêta pour regarder sa carte. Il venait à peine de repartir lorsque une jeep lancée comme une balle le doubla, manquant le renverser, et l'obligeant à freiner précipitamment.

- Connard de motard ! marmonna Lara, jetant un rapide coup d'oeil dans son rétroviseur et voyant le motard lever les bras au ciel.
Elle roulait vite, très vite, sur une route sinueuse, au milieu de montagnes recouvertes de forêts. Elle s'était d'abord crue dans les Alpes autrichiennes, avant de conclure qu'elle était dans les Carpates. Bien sûr, elle n'en était pas sûre. Il aurait été étonnant que Banks l'ai laissée pourrir dans une fausse clinique aussi près du but ultime de l'histoire. En même temps, il devait garder un oeil sur elle. Auquel cas il était déjà au courant de son évasion. Moins de deux heures plus tard, après avoir traversé plusieurs villages, elle arriva au bord d'une grande ville. Un panneau, sur le bord de la route, lui indiqua Bucuresti.
- Bucarest... Bingo !
Elle gara la jeep, trop facilement repérable et entreprit de faire du stop. Si elle avait récupéré son équipement, il lui manquait quand même l'essentiel : de l'argent ! Une voiture sportive s'arrêta moins de deux minutes plus tard. Le conducteur, un jeune homme nanti et visiblement très fier de sa personne lui dit quelques mots en roumain et en souriant. Jouant le jeu, Lara prit une pose lascive contre la portière.
- Je ne parle pas le roumain, dit-elle.
- Anglaise ? J'ai fait mes études à Oxford ! Je vous emmène ?
- A la meilleure banque, ce serait parfait ! répondit Lara en montant dans le bolide.
- Facile ! Je m'appelle Nicolaï.
- Lara.
- Ah, Lara... Je t'aime !
- Pardon ?
- Vous ne connaissez pas Lara Fabian ? C'est une chanteuse française. On entendait que ça l'année dernière, sur le campus.
- Euh, ce n'est pas... enfin, je ne m'appelle pas Fabian. On pourrait y aller, maintenant ?
Le jeune homme démarra en trombe. Durant le trajet, Lara évita habilement et poliment les différentes avances du jeune roumain. Poliment, car elle avait encore besoin de lui et elle le trouvait finalement aussi mignon que gentil. Comme promis, il la déposa devant la banque nationale roumaine. Lara en ressortit une heure plus tard, et constata avec surprise que le jeune homme l'avait attendu.
- Il ne fallait pas m'attendre, Nicolaï, dit-elle en montant dans la décapotable.
- Une splendeur comme vous, ça ne se lâche pas, répondit-il. Où va-t-on ?
- A l'aéroport. Je retourne chez moi, en Angleterre.
- Oh... Quel dommage...
- Rassurez-vous, je compte revenir très rapidement...
Le jeune homme ne releva pas le ton inquiétant de cette dernière phrase et démarra.

Quelques heures plus tard, un taxi londonien déposa Lara au manoir Croft. Elle constata aussitôt que celui-ci était en pleine rénovation. Elle traversa le parc à pieds, passant au milieu de tas de gravier et de sable, d'empilement de parpaings, de camions, et d'ouvriers. Elle entra enfin dans le manoir et resta immobile dans le grand hall d'entrée. Elle soupira, profitant solitairement du plaisir d'être vivante et d'être de retour. Elle refoula quelques larmes qui voulaient sortir, puis prit une profonde inspiration.
- Winston ! hurla-t-elle. Bryce ! On se bouge les fesses ! On a du boulot.
Les deux hommes arrivèrent presque simultanément dans le hall d'entrée. Winston ne se départit pas de son flegme légendaire et se contenta de saluer sa jeune maîtresse d'un hochement de tête. Bryce s'écroula en pleurant.
- Content de vous revoir parmi nous, Miss, dit calmement Winston. Que puis-je faire pour vous ?
- D'abord, vous me préparez le plus grand bain que vous ayez jamais fait, ainsi qu'un brunch du niveau de l'équipe nationale de rugby. Bryce, tu vas arrêter de chialer et me préparer tes meilleurs ordinateurs pour le briefing du siècle. Winston, pendant que je mangerais dans mon bain, vous me préparerez armes et véhicules pour un petit tour dans la Roumanie sauvage.
- De retour aux affaires, Miss ?
- Mieux, Winston. On peut même dire que ça va chier.

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