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Mémoire(s)

Mémoire(s), Chapitre 14, par Clara, le 17 octobre 2004.

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Chapitre 14 : Approches

Isperih, Bulgarie du Nord, 6h41. Le Pr. Walter Chemiski s'accrochait tant bien que mal à son fauteuil, tandis que l'hélicoptère survolait la forêt du Bragon. Il officiait désormais dans le rôle d'Eclaireur et se devait de rester digne. Pour lui et pour l'honneur de l'Ordre, ainsi que pour le Maître qui le dévisageait de ses yeux noirs, quand il ne s'entretenait pas en arabe avec l'homme au regard torve qui avait pris place à ses côtés. Il le lui avait présenté comme le commandant Afta. Chemiski n'avait jamais entendu parler de cet homme, mais on murmurait parmi les scientifiques qu'il n'avait pas toujours porté ce nom, et que plusieurs attentats au Proche-Orient avaient été révendiqués par ses troupes. L'hélicoptère les ramena sur un champ à l'abandon, près du village. En sortirent les Gardiens jumeaux, arme au poing et le visage concentré. « Guettant quoi ? se dit Chemiski ». Il garda toutefois ses réflexions pour lui et se détourna tandis que l'Excellence et Afta descendaient à leur tour. Le Maître lui jeta un regard. Chemiski savait ce que ça signifiait. Il avait intérêt à faire vite.
Dans la salle voûtée, il se pencha sur la table où l'attendaient les Français. De nombreuses cartes étaient étalées sur le plateau. Chemiski les balaya d'un geste. Son nouveau rôle au sein de l'Ordre, s'il le remplissait d'angoisse en face des yeux brûlants du Maître ou du regard fuyant d'Afta, lui donnait face à ses collègues une assurance nouvelle. Il entoura plusieurs points au marqueur rouge sur une immense carte datant du XIXe siècle.
- Nous avons repéré huit églises en ruines dans le périmètre qui nous intéresse. Parmi elles se trouve celle qui renferme la Porte. Le Jour de Gloire est proche, Frères.
Il claqua du doigt et l'une des jeunes femmes - une jeune Française dont il avait oublié le nom - avança, une pile de dossiers à la main. Chemiski en lança un à chacun.
- Analysons ceci, Frères. Parmi ces données se trouve l'information ultime. Et l'assurance d'une récompense, l'Arme ultime, celle que notre Ordre a toujours cherchée.
Chacun se pencha en silence sur son dossier. Le silence s'était étendu à toute la salle. Le grand jour était proche et tous repassaient fébrilement les textes, dessins, gravures et cartes relatives à la Porte du Nord. Dans l'esprit de chacun, outre l'excitation du grand moment et une vague appréhension, la plus totale confiance en l'Ordre et en l'Excellence régnait. Le petit Américain leva les yeux. Il se rendait compte que cet assourdissant silence et de ses raisons. Il jeta un coup d'oeil au dossier qu'il avait saisi sur le dessus de la pile. Eglise St Nikolaos. Patron des marins.
Un feuillet s'échappa du dossier, une photocopie. Dessus, l'écriture régulière de l'un des chercheurs s'étalait. « Grimoire dit de l'Archange Gabriel, collection privée ». Sur la page, une vieille gravure à demi effacée reproduisait sans doute une icône russe. Du haut du ciel, Nikolaos surplombait la mer et veillait sur les bateaux. Bien loin au-dessous, un bateau, ballotté par les flots, semblait attaqué de toutes parts par des oiseaux monstrueux à tête humaine.
- Des sirènes, murmura le petit homme. Ça ne peut pas être un hasard.
Le capitaine était ligoté à un mât, les oiseaux tournaient autour de lui. Auprès du visage miniature de l'homme attaché, la main d'un peintre avait annoté « Odus... », mais la fin était effacée.
Chemiski restitua les lettres manquantes. « Odusseus », Ulysse en grec. Nikolaos veillait sur Ulysse. Ulysse avait ouvert la Porte du Nord. Instantanément, Chemiski fit la liaison. Il savait où se trouvait la Porte. Et il savait aussi ce que l'Excellence avait l'intention de faire. Chemiski leva le regard et rencontra celui du Français. Il baissa les yeux et fit semblant de retourner à sa lecture, tentant de faire comme si de rien n'était, de ne pas trembler, d'empêcher sa petite moustache blanche de frémir. Quelques instants plus tard il s'éclaircit la gorge et partit en direction des toilettes. La nausée le prit alors qu'il se penchait au-dessus d'un antique lavabo en porcelaine. Le Maître voulait ouvrir la Porte. Et y pénétrer de lui-même. Seul comme l'avait fait Ulysse. Alexander O'Donnell voulait devenir immortel. Celui qui franchirait la porte et reviendrait des Enfers resterait en vie pour l'éternité. L'Excellence n'allait pas découvrir une arme qui pourrait ramener l'Ordre sur Terre. Il voulait la vie éternelle.
L'Odus du grimoire de Lucifer et celui de la gravure formaient-ils une seule et même personne ? Revenu des Enfers, Ulysse aurait été immortel...C'était la prophétie. Chemiski tremblait, il dut s'accrocher au lavabo pour ne pas tomber en se rendant compte de l'horreur qu'il avait contribué à accomplir. Dans son esprit, le doute commença à s'insinuer.

On dit toujours qu'à deux on accomplit le travail de quatre personnes seules. Dans mon cas ce n'est pas vrai. En me relevant pour la deuxième fois dans le couloir des portes, je me sens de taille à affronter la moitié de la Terre. Qu'on me donne un flingue et ce sera la Terre entière. Je hurle presque de rage en défonçant une troisième porte. Et je le regrette tout de suite. Le vent glacial s'engouffre dans ma gorge et j'ai instantanément le souffle coupé, les poumons gelés. Je suffoque, tousse. Ma gorge me semble soudain en feu. Je me plie en deux de douleur. Entre les larmes qui gèlent sur mes joues, j'aperçois les cimes des montagnes sur lesquelles souffle un blizzard coupant. Tout est blanc. Je veux faire demi-tour, mais bien sûr la porte n'est plus là. Je cherche la Chamane des yeux, mais le vent, la neige et la glace qui balayent l'horizon m'empêchent de voir quoi que ce soit. Sauf une lueur. Au loin. Orange. La main devant moi, je descends le sentier escarpé, de la neige jusqu'à la taille. Je sens mes doigts s'engourdir. Combien de temps avant que j'en perde un ? Une, deux minutes ? Déjà mes jambes bleuissent. J'avance le plus vite possible vers la lumière, vers ce qui se révèle être un feu énorme, gigantesque. L'image me rappelle quelque chose de familier. Et de très désagréable. Au moment où je mets le doigt dessus, le feu explose littéralement, et un souffle chaud me balaye la figure. Je vois quelque chose (quelqu'un ?) dévaler l'un des pentes de la montagne, poussé par le souffle. Au moment où je veux aller voir de plus près une main chaude se pose sur mon épaule.
- Tu te souviens, n'est-ce pas ?
Je plisse les yeux, mais le blizzard semble tomber de lui-même. Et il révèle la carcasse d'un avion en feu. Le corps qui glissait, c'était moi. J'avais 21 ans et je rentrais en Angleterre. Je regarde la Chamane.
- Où tout cela a-t-il commencé ?
A cet instant, son regard vieux comme le monde me fait prendre conscience de ma naïveté. Il n'y a ni commencement ni fin. Tout et rien n'ont commencé ici, ou au Cambodge, ou en Egypte. Mais tout pourrait prendre fin. La vieille femme sourit comme si elle avait saisi mes pensées. Oui, tout pourrait prendre fin avec l'ouverture de la Porte, ce monde pourrait prendre fin. Le temps d'un clignement d'yeux, et nous réintégrons le couloir des portes. La Chamane pose la main sur moi.
- Tu choisiras judicieusement.
Un instant, nous n'existons plus que par ce contact, par cette main posée sur mon épaule qui est tout ce qui me relie à la vie. Puis je déplace la main. Et je me mets en route.

Le dévidoir se déroula lentement, dans un bruit feutré. Jane imagina avec une certaine angoisse qu'il ne s'arrêterait pas et qu'elle allait finir écrasée sur les pavés de la place de l'Hermitage, quelques vingt mètres plus bas. Mais le frein s'amorça lentement et ralentit sa chute en douceur à dix mètres cinquante du sol. La nuit était noire et une lune rousse transparaissait par saccades entre les nuages lourds. Mauvais présage. Elle se souvenait du dicton de son enfance. « A lune rousse, nuit noire ». Elle secoua la tête. Ce n'était pas le moment de s'endormir. L'air de Saint Pétersbourg était déjà presque hivernal. Suspendue à un filin d'acier, à quelques dizaines de centimètres des moulures dorées de la façade, elle se remémora ce que lui avait dit Sheridan. Pas de lasers, mais des détecteurs de mouvement dans chaque salle. Deux gardes par étages. Cinq étages. La salle grecque au troisième. Les gardes effectuaient un tour des salles toutes les 15 minutes. Puis un phare balaierait la façade du palais russe. Il en serait de même pendant toute la nuit. S'apercevant que même en tendant le pied elle se parvenait pas à le poser sur la corniche qui parcourait la façade, elle se balança d'avant en arrière, lentement. A la deuxième fois elle s'accrocha à une sculpture de pierre, posa le pied sur la corniche large de quelques centimètres et se colla au mur, détachant le mousqueton qui la reliait au filin et actionnant la télécommande afin de faire remonter celui-ci au niveau des toits.
Avec précautions, dans la quasi-obscurité, Jane se glissa le long de la façade jusqu'à une haute fenêtre à espagnolette. Revêtant un gant noir, elle le posa sur la fenêtre et en traça le contour à l'aide d'une pointe de diamant obligeamment fournie par Sheridan. A sa pensée, elle eut un bref sourire. Au grand désespoir des deux hommes, elle l'avait laissé au soin de Winston, avec l'ordre de le requinquer le plus rapidement possible, quels que soient les moyens utilisés. Elle avait cru distinguer une lueur d'amusement dans les yeux du vieil homme, qui semblait envisager avec une certaine joie l'idée de venger le second sac du manoir. Elle avait donc laissé Terry et Croft Manor dans un triste état.
Le gant adhésif lui permit de récupérer la plaque de verre qu'elle déposa sur la corniche. Elle glissa son bras par le trou et actionna la poignée. La fenêtre s'ouvrit sans un grincement. Avec lenteur, elle pénétra dans le couloir de circulation. Elle se remémora son objectif : la salle de contrôle, troisième étage. Juste à côté des antiquités grecques. Les murs étaient garnis des moulures dorées propres à l'époque impériale, et Jane avança souplement le long de ceux-ci. Elle portait un pantalon noir serrant, une paire de bottines noires montantes et un débardeur noir. Sheridan l'avait munie d'une ceinture de Lara, à laquelle il avait accroché une véritable panoplie de cambrioleur : clé, passe-partout, crochets. D'un côté elle portait plusieurs grenades anesthésiantes miniatures, qu'il lui avait montré comment utiliser. Elle saisit l'une de ces pastilles lorsqu'elle perçut des pas au bout du couloir. Elle se trouvait en plein milieu, et une alcôve se découpait sur sa droite, dans laquelle elle se précipita. Jetant un coup d'oeil discret, elle vit que l'un des gardiens avait décidé d'effectuer sa ronde plus tôt que prévu. Sans hésiter elle dégoupilla la capsule et la lança aux pieds du type qui s'évanouit dans la seconde. Sans respirer, elle avança jusqu'au bout du couloir et franchit la porte. Le couloir suivant formait un angle. Par chance, aucun des couloirs n'était muni de caméra de surveillance. Seules les salles en possédaient.
Le poste de contrôle était la première porte à droite au bout de l'alcôve. Elle tourna la poignée avec précaution et y pénétra sans un bruit. Aucun des deux hommes assis devant les écrans de surveillance ne remarqua sa présence. Elle dégoupilla une seconde grenade et sortit un instant dans le couloir. Lorsqu'elle entra à nouveau dans le poste de garde, les deux hommes ronflaient affalés l'un contre l'autre. Elle se pencha vers le poste de contrôle et trouva comment désactiver le système de sécurité des salles du 3e étage.
Jane étouffa un juron. Il manquait un garde. Ils étaient sensés être trois. Un sifflement dans le couloir répondit à sa question. Se plaçant près de la porte, elle se fit la réflexion que l'homme sifflait affreusement faux. Pourvu qu'il ne lui prenne pas l'idée de faire du zèle ! Lorsqu'il entrouvrit la porte, elle le laissa se rendre compte du problème. Le gardien resta comiquement debout pendant cinq secondes devant ses collègues assoupis. A l'instant où il songeait à se retourner, Jane lui asséna un coup du tranchant de la main sur la nuque, et il s'écroula instantanément. Satisfaite, elle se pencha vers lui et attrapa la paire de menottes qui cliquetaient à sa taille.
- Je vais vous dire, les menottes ne sont pas précisément mon truc, mais si vous y tenez.
Par mesure de sécurité elle bâillonna son prisonnier.
- De cette façon, vous éviterez de massacrer davantage ce pauvre Tchaïkovski.
En partant elle lança ne dernière grenade anesthésiante et ferma la porte.
Selon le plan qu'elle et Terry avaient élaboré, elle avait 15 minutes avant que les hommes ne se réveillent. Elle ouvrit la porte de la salle « Antiquités grecques » et avisa la vitrine à l'autre bout de la pièce. C'était bien plus qu'il ne lui en faudrait. Elle avança vers la vitrine. Tout était calme, seuls ses pas étouffés perçaient le silence. Sous le regard lourd de reproches des statues antiques, elle traversa la salle et se posta devant la vitrine. Il était bien là, tel que Terry le lui avait décrit. Le cheval de l'aurige se trouvait au centre du trésor de Priam. Tandis qu'elle le contemplait, dehors, la neige se mit à tomber.

Sur la place, le bruit de deux hélicoptères alerta les policiers en faction devant le musée de l'Hermitage. Ne sachant que faire, les deux représentants de la loi se contentèrent de poser la main sur leur arme et d'avancer vers les deux vaisseaux. Ils reçurent chacun une seule balle au milieu du front. Les hélicoptères se posèrent et, sans bruit, les troupes débarquèrent. Ils étaient entre vingt-quatre. Une élite de soldats armés jusqu'aux dents, envoyés pour ramener un objet particulier. A la suite des troupes de l'Ordre, le commandant Afta sortit, précédé par les deux Gardiens. D'un geste, il désigna aux soldats le bâtiment à prendre d'assaut. Il put alors admirer la discipline de ses mercenaires. Les 12 grappins lancés vers le toit atteignirent tous leur but. Sans assurance, les soldats montèrent jusqu'au toit et désactivèrent les phares, plongeant la Place dans la pénombre. Ils redescendirent rapidement et s'arrêtèrent à hauteur des fenêtres. Sur le signe de l'un d'entre eux, ils prirent appui sur la façade et ensemble s'élancèrent vers l'arrière, pieds en avant.

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